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Charme contre les trois fléaux, avec inscriptions utilisant des sinogrammes hancha et l’alphabet han’gŭl

삼새부  -  三災符
Charme contre les trois fléaux, avec inscriptions utilisant des sinogrammes hancha et l’alphabet han’gŭl
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Le terme de « charme » s’applique surtout aux charmes écrits, mais a tendance à s’étendre aux charmes comportant des figures géométriques ou zoomorphes, comme c’est le cas ici.
Ces papiers sont inscrits avec des écritures talismaniques, que les fidèles, bouddhistes, taoïstes ou mêmes chrétiens, portent sur eux, parfois à même le corps, ou qui sont collés à des endroits précis des habitations afin d’éloigner les démons, de conjurer les malheurs et de conférer une force bénéfique à l’individu qui les porte ou au foyer où ils se trouvent. Ils doivent être produits par des initiés, chamans ou devins. Ils sont parfois composés à la demande, mais le plus souvent imprimés selon des stéréotypes et vendus dans les temples ou boutiques spécialisées en articles de piété. C’est à cette seule condition qu’ils sont chargés de leur pouvoir apotropaïque ou bénéfique.
Notre charme, comme son nom l’indique, est destiné à lutter contre les « trois malheurs » que sont soit les malheurs causés par les trois éléments naturels : vent, eau et feu, ou bien la maladie, la pauvreté et l’enterrement. Contrairement à la croyance selon laquelle la couleur rouge vermillon fait fuir les démons, notre charme est imprimé à l’encre noire.

Au centre de la gravure figure un oiseau à trois têtes, un rapace, sans doute un faucon, dont chacune des têtes annihile l’un des trois fléaux dont on cherche à se protéger. Selon les explications fournies par Josef Kyburz, ces trois têtes correspondraient également aux « trois années des fléaux » (samjaenyŏn) qui dans le cycle de douze années sont considérées comme néfastes pour l’homme, selon la position des astres à sa naissance.
Au-dessus de l’oiseau se trouve le titre de l’amulette écrit en caractères chinois stylisés de grand module dans un style calligraphique talismanique propre aux charmes coréens. Ils sont accompagnés du eum, la vocalisation du caractère chinois et sa transcription en han’gŭl à gauche. Les trois caractères coréens se lisent de haut en bas tandis que les trois caractères chinois se lisent horizontalement dans le sens traditionnel, c’est-à-dire de droite à gauche. On trouve à droite une double colonne de texte en caractères chinois et en han’gŭl, à gauche, un texte sur trois colonnes en caractères coréens et au centre une figure représentant un volatile à trois têtes.
Le texte de droite sur deux colonnes se lit tout d’abord en hancha et en parallèle figure la vocalisation des caractères chinois en eum. Ces deux colonnes de texte indiquent la façon dont le charme doit opérer. C’est par l’oiseau à trois têtes représenté au centre de la gravure, que seront éradiqués les trois grands fléaux susceptibles de frapper.
À gauche de l’oiseau figurent trois colonnes d’un texte assez long, en caractères coréens uniquement, se lisant de droite à gauche et de haut en bas. Il s’agit d’une énumération des fléaux contre lesquels le charme doit opérer. Sous le corps de l’oiseau, un court texte est copié sur quatre colonnes de quatre et cinq caractères. Enfin, entre le titre et la première colonne de texte à droite, une main, peut-être celle du chaman ou du devin, a inscrit quelques caractères cryptés magiques réécrits sur des caractères imprimés qu’il est difficile de déchiffrer.
Selon Josef Kyburz, ce charme était supposé être collé sur le linteau de la porte principale de la maison.

Ces amulettes et charmes sont répandus parmi les cultures de I’Extrême-Orient, néanmoins les amulettes et charmes coréens conservent par rapport à ceux produits en Chine ou au Japon, leurs singularités, tant du point de vue calligraphique que du point de vue iconographique. Cette amulette talisman est particulièrement typique de l’imagerie magico-religieuse coréenne. Très prisées des collectionneurs, Collin de Plancy a certainement estimé qu’il était important d’en rassembler plusieurs spécimens. Encore peu étudiées, elles sont l’expression des croyances populaires coréennes ancestrales. 
Laurent Héricher

Bibliothèque nationale de France

  • Date
    19e siècle ?
  • Lieu
    Corée
  • Description technique
    Impression xylographique sur papier, 1 feuille, 24,6 x 21,6 cm
    Document en coréen
  • Provenance

    BnF, département des Manuscrits, Coréen 107

  • Lien permanent
    ark:/12148/mm4546c1q4fs5