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Extrait

Le Déluge, la plus ancienne des fins du monde

Épopée de Gilgamesh, 2e millénaire av. J.-C. (version ninivite revue au 1er millénaire av. J.-C.), tablette XI, vers 89-134.
La plus ancienne référence écrite à un événement cataclysmique se trouve dans un texte conservé sur des tablettes d’argile : l’Épopée de Gilgamesh. Ce texte très populaire dans la Mésopotamie antique a subi de nombreuses transformations au fil des siècles. Le Déluge décrit est très proche de celui que l’on trouve dans la Bible : le héros y échappe de la même manière que Noé, en construisant un bateau où trouvent refuge sa famille et les animaux.
 

Et le moment [fatal] arriva :
[Lorsque], dès l'aurore, Il chut des petits pains,
Et des averses de froment, au crépuscule,
J'examinais l'aspect du temps :
Il était effrayant à voir !
Je m'introduisis donc dans le bateau,
Et j'en obturai l'écoutille :
Celui qui la ferma, PuzurAmurru, un nocher,
Je lui fis présent de (mon) palais, avec ses richesses.
Lorsque brilla le point du jour,
Monta de l'horizon une noire nuée,
Dans laquelle tonnait [le dieu de l'orage] Adad,
Précédé de Sullat et Hanis,
Hérauts divins qui sillonaient collines et [plat] pays.
Nergal arracha les étais [des vannes célestes]
Et Ninurta se mit à faire déborder les barrages [d'en haut],
Tandis que les Dieux infernaux, brandissant des torches,
Incendiaient, de leur embrasement, le pays (tout entier).

[…] Et l'Anathème passa sur les [hommes], comme la Guerre.
Personne ne voyait plus personne.
Du ciel, les multitudes n’étaient plus discernables, parmi ces trombes d’eau.
Les dieux étaient épouvantés par ce déluge :
Prenant la fuite, ils grimpèrent jusqu’au plus haut du ciel,
Où, tels des chiens, ils demeuraient pelotonnés et accroupis au sol.

[…] Six jours et sept nuits durant,
Bourrasque, Pluies battantes, Ouragans et Déluge continuèrent de saccager la terre.
Le septième jour arrivé, Tempête, Déluge et Hécatombe cessèrent,
Après avoir distribué leurs coups (au hasard), comme une femme dans les douleurs.
La « Mer » se calma et s’immobilisa, Ouragan et Déluge s’étant interrompus !
Je regardai alentour : le silence régnait !
Tous les hommes avaient été retransformés en argile ;
Et la plaine liquide semblait un toit-terrasse.

L'Épopée de Gilgameš : le grand homme qui ne voulait pas mourir, traduit de l'akkadien et présenté par Jean Bottéro, Paris : Gallimard, 1993, p. 189-192.
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