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Extrait

Du romantisme

Alfred de Musset, La Confession d’un enfant du siècle, 1836
Après avoir évoqué le « mal du siècle », le narrateur aborde l’influence de Chateaubriand sur la littérature et, à travers elle, sur les jeunes romantiques de sa génération.

Mais, pareille à la peste asiatique exhalée des vapeurs du Gange, l’affreuse désespérance marchait à grands pas sur la terre. Déjà Chateaubriand, prince de poésie, enveloppant l’horrible idole de son manteau de pèlerin, l’avait placée sur un autel de marbre, au milieu des parfums des encensoirs sacrés. Déjà, pleins d’une force désormais inutile, les enfants du siècle roidissaient leurs mains oisives et buvaient dans leur coupe stérile le breuvage empoisonné. Déjà tout s’abîmait, quand les chacals sortirent de terre. Une littérature cadavéreuse et infecte, qui n’avait que la forme, mais une forme hideuse, commença d’arroser d’un sang fétide tous les monstres de la nature.

Alfred de Musset, Œuvres complètes illustrées, Paris, Librairie de France, 1927-1929, p. 14.
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