-
Article
L’exploration, mode d’emploi
-
Album
Le quotidien de l'exploration
-
Vidéo
Comment se prépare une mission d’exploration ?
-
Album
Images mythiques d’explorateurs
-
Vidéo
L’explorateur est-il toujours un Européen ?
-
Album
Dans l'ombre des explorateurs
-
Vidéo
Existe-t-il des femmes exploratrices ?
-
Album
Derrière les explorateurs, des institutions
-
Album
Combler les blancs de la carte
-
Album
De retour d'exploration
-
Album
La passion de l'inventaire
-
Article
La Société de géographie
-
Vidéo
A quoi ont servi les missions d’exploration ?
De retour d'exploration














Contrairement au tourisme, qui se développe aussi tout au long du 19e siècle, l’exploration poursuit un but scientifique.
Missionnés par des gouvernements ou des sociétés savantes, les explorateurs se doivent de présenter les résultats de leur travail. Sur le terrain, ils mesurent, dessinent, photographient, interrogent, collectent ; à leur retour, leurs publications s’ornent de gravures et s’appuient sur des chiffres, leurs expositions exhibent des objets rapportés, leurs conférences s’animent par la projection d’images.
Discutées, confrontées entre elles, exposées au public, les informations rapportées se transforment peu à peu en savoir, permettant de faire avancer aussi bien les sciences naturelles que la connaissance de l’homme… et la renommée des voyageurs et voyageuses !
Mots-clés
Collecter des informations
Si tous les explorateurs prennent des notes à la main et se livrent à l’exercice du croquis, certains font preuve d’un véritable talent pour le dessin.
Le docteur Feuvrier est de ceux-ci. Envoyé à la cour de Perse en 1889 afin de remplacer le médecin français du shah, Joseph Tholozan, il suit dans tous ses déplacements une cour encore largement nomade. Ses carnets de croquis conservent la mémoire des campements, des paysages traversés et des hommes rencontrés.
Revenu en France, Jean-Baptiste Feuvrier rédige un récit de voyage, Trois ans à la cour de Perse, où certains de ses croquis sont utilisés pour les illustrations.
Bibliothèque nationale de France
Collecter des informations
Lorsqu’il est sur le terrain, l’explorateur doit déjà penser à l’après : il lui faut collecter des informations, de la manière la plus objective possible, afin de répondre au mieux aux exigences de scientificité. Inventée en 1839, la photographie séduit tout particulièrement les voyageurs, car elle est considéré comme un moyen neutre d’enregistrement de la réalité, plus fiable que le dessin. Dans le dernier quart du 19e siècle, elle devient indissociable de toute expédition.
Parti au Congo en 1906-1907, le couple formé par Jean-Marc et Amélie Bel rapporte deux albums de photographies, qui documentent leur activité. Considérée par son mari comme un atout pour pénétrer des sociétés parfois méfiantes envers les Européens, Mme Bel y figure régulièrement, donnant des « séances de phonographe », discutant avec des femmes ou échangeant des objets. Chaque photographie est précisément légendée.
Mots-clés
Bibliothèque nationale de France / Société de géographie
Collecter des informations
Tout explorateur se doit de produire une carte des espaces qu’il traverse. La mesure des distances se fait au jour le jour, en comptant les pas grâce à un podomètre, ou en prenant pour marqueur la marche des animaux de bât. S’ajoute à cela l’utilisation d’instruments de localisation géographiques, comme la boussole, le compas ou le sextant. Les explorateurs relèvent également les noms de lieux, ou toponymes : villes et villages, reliefs, cours d’eau, lieux-dits…
Jean Chaffanjon, qui se déplace essentiellement en pirogue sur l’Orénoque, un fleuve du nord de l’Amérique du sud, utilise essentiellement la boussole. Si son dessin manuscrit manque de précision, il lui permet, dans sa publication ultérieure, de proposer une carte précise du bassin du fleuve.
Mots-clés
Bibliothèque nationale de France / Société de géographie
Publier et diffuser
Lors des grandes expéditions scientifiques, comme celle qui suit les armées de Bonaparte en Égypte, plusieurs savants participent à l’exploration. Les publications qui en découlent se présentent en plusieurs volumes, qui déclinent les découvertes discipline par discipline. Parfois, un premier tome décrit le voyage lui-même, au jour le jour.
La Description de l’Égypte, ou recueil des observations et recherches qui ont été faites en Égypte pendant l’expédition de l’armée française, en est l'archétype. Publiée pour la première fois en 1809, elle comporte pas moins de vingt-trois volumes, dont quatorze sont dédiés uniquement aux planches. Les livres, dont les plus grands mesurent plus d’un mètre, sont consacrés successivement aux Antiquités, à l’État moderne et à l’histoire naturelle. Un atlas vient les compléter.
Edme François Jomard, ingénieur-géographe de son état, est l’un des membres de la commission chargée de la publication de la Description de l’Égypte, dont il coordonne la parution. Il fait aussi partie de ceux qui fournissent des images à reproduire dans l’ouvrage, comme ces aquarelles représentant deux de pyramides dans l’oasis du Fayoum et un minaret non-identifié.
Bibliothèque nationale de France / Société de géographie
Publier et diffuser
Les expéditions plus modestes, comme celle de Charles-François Xavier Rochet d’Héricourt (1801-1854) dans la Corne de l’Afrique, donnent lieu à des récits de voyage plus courts et circonstanciés que les grandes expéditions. Destinés à un public plus large, ces ouvrages laissent souvent une large place aux gravures, réalisées à partir de photographies, de dessins ou, comme ici, de peintures à la gouache. Ils sont aussi une manière pour l’explorateur d’accéder à la reconnaissance.
Mots-clés
Bibliothèque nationale de France
Publier et diffuser
Au moment où Rochet d’Héricourt publie ce premier récit, en 1841, il est à peine de retour en France après sept mois passés auprès de Sahlé-Sélassié, souverain du Choa, un royaume en Ethiopie actuelle. Sa publication lui donne un poids certain, lui permet à la fois d’obtenir la légion d’honneur et d’être adoubé par les autorités pour retourner négocier un traité politique et commercial. Parallèlement, l’Académie des Sciences lui fournit du matériel scientifique, afin de se livrer à des observations et des mesures. L’explorateur se fait donc tout à la fois ambassadeur, géologue, botaniste, géographe…
Mots-clés
Bibliothèque nationale de France
Publier et diffuser
Les Sociétés de géographie, comme celle de Paris, jouent un rôle essentiel dans la diffusion de la connaissance accumulée par les explorateurs.
Elles leur offrent tout d’abord une tribune, sous la forme de conférences, moments de sociabilité auxquels assistent spécialistes et curieux. À partir de 1875, elles s’accompagnent de projections photographiques sur plaques de verre. Les membres se retrouvent également lors des séances ordinaires, afin de discuter des projets et des publications.
Par ailleurs la Société de géographie, comme les autres sociétés savantes, édite régulièrement un Bulletin, qui permet de suivre l’actualité de l’exploration et de diffuser découvertes et conseils.
Mots-clés
Bibliothèque nationale de France
Publier et diffuser
À partir de 1878, le musée du Trocadéro accueille les collections ethnologiques rapportées par les explorateurs et organise des expositions autour des différentes missions. L’accrochage, toujours très dense, joue sur des effets d’accumulation et sur l’évocation des modes de vie et des espaces concernés, par des reconstitutions ou des mises en relation avec des documents photographiques.
Les objets rapportés par Joseph Napoléon Martin de sa seconde mission en Sibérie (1882-1886) sont particulièrement divers : boîtes, figurines chamaniques, éléments de costumes, fourrures, instruments de musique, armes, miroirs… Deux mannequins exposent des tenues complètes, de part et d’autre d’une grande carte de la région. Comme toujours, il est difficile de savoir comment ces éléments ont été acquis et dans quel contexte ils étaient utilisés. Ils sont désormais en partie conservés au musée du Quai Branly, à Paris.
Mots-clés
Bibliothèque nationale de France / Société de géographie
Dans toutes les disciplines
Découverte du monde, l’exploration est évidemment avant tout une entreprise géographique, censée permettre de « combler les blancs sur les cartes » et mieux connaître les territoires lointains. Cartes et représentations de paysages abondent donc dans les ouvrages des voyageurs.
Au début du 19e siècle, Tombouctou demeure une énigme et un mythe pour les Européens. Connue par les textes médiévaux comme une cité majeure, elle est interdite aux non-musulmans. Le major britannique Alexander Gordon Laing, en 1826, paye de sa vie sa visite. C’est pourquoi la Société de géographie lance en 1825 un « prix d’encouragement pour un voyage à Tombouctou et dans l’intérieur de l’Afrique » de 10 000 francs.
René Caillié, qui avait déjà fait deux voyages au Sénégal, relève le défi et se dirige vers la ville sainte déguisé en pèlerin musulman. Il atteint en avril 1828 une ville qui le laisse un peu déçu par son état de ruine. Ce dessin, publié dans le récit de son voyage en 1830, est donc la première représentation occidentale de Tombouctou. Caillié ramène également dans ses notes, prises à la dérobée, des esquisses de plantes et des éléments sur la langue mandingue, qu’Edme-François Jomard l’aide à mettre en forme et diffuser.
Mots-clés
Bibliothèque nationale de France
Dans toutes les disciplines
Confrontés à des interlocuteurs ne s’exprimant que dans leurs langues, les explorateurs sont très souvent contraints de s’initier aux idiomes étrangers. À Paris, l’École des langues orientales devient rapidement le lieu où se forment de nombreux voyageurs. Tous, pourtant, ne prêtent pas la même attention aux langues dans leurs écrits : si certains se contentent de signaler l’usage de tel ou tel dialecte, d’autres se livrent à de véritables études linguistiques.
C’est le cas d’Heinrich Barth, explorateur allemand parcourant l’Afrique du Nord et le Sahel entre 1849 et 1855 pour le compte des Britanniques. Homme de grande culture et ne faisant jamais preuve d’un sentiment de supériorité raciale, il maîtrise l’arabe et plusieurs langues africaines, comme le haoussa ou le kanouri. Ses publications sont très éloignées des habituels récits de voyageurs. Dans un style purement académique, il y propose une vaste compilation d’inscriptions, notamment en tifinagh, écriture des nomades touaregs.
Bibliothèque nationale de France / Société de géographie
Dans toutes les disciplines
Le 19e siècle marque l’apogée des grandes expéditions archéologiques : partout, en Amérique du Sud, au Moyen-Orient, en Égypte, en Inde, en Asie du Sud-est, on pratique des fouilles afin de découvrir les témoignages de civilisations cachées… et de remplir les musées.
Envoyé en Indochine, alors toute jeune colonie française, l’ingénieur et architecte Lucien Fournereau parcourt les ruines de Siem Réap, Nokor Vat, Oudong, et surtout Angkor, qu’il étudie, restaure et photographie dans des conditions souvent difficiles. Mais il s’intéresse aussi aux monuments toujours utilisés, comme le temple de Vat Phô, à Bangkok.
Mots-clés
Bibliothèque nationale de France / Société de géographie
Dans toutes les disciplines
De 1826 à 1833, Alcide d’Orbigny parcourt l’Amérique du sud avec « [s]on filet à papillon et [s]on fusil, fidèles compagnons ». Naturaliste confirmé, élève de Georges Cuvier, il est missionné par le Museum d’Histoire naturelle pour compléter les travaux réalisés avant lui par Alexandre de Humboldt et Aimé Bonpland.
Son ambition est quasi-encyclopédique. Pendant les huit années où il parcourt de long en large tous les territoires de l’Amérique du sud, il s’intéresse aussi bien aux populations qu’à leur histoire et à leur environnement. Il collectes des plantes, des fossiles et des insectes, chasse et fait naturaliser des oiseaux et de petits mammifères, et les envoie par caisses au Museum, tout en prenant des notes minutieuses qui serviront de base à ses neuf tomes de mémoires.
Récompensé à son retour par la Société de géographie, Alcide d’Orbigny est à l’origine de la découverte de nombreuses espèces végétales et animales, dont plusieurs portent son nom.
Museum National d'Histoire Naturelle
Dans toutes les disciplines
Dans les dernières décennies du 19e siècle, l’archéologie et l’anthropologie, aux frontières jusqu’alors floues, se séparent en deux disciplines distinctes. La première s’attache aux sites, aux ruines, aux origines des civilisations, se concentrant sur l’Europe, l’Asie, l’Amérique ; la seconde prend appui sur l’observation directe de peuples sans écriture ni monuments, situés aux confins les plus lointains et isolés.
L’étude physique et culturelle de ces hommes reste par contre intimement liée dans les pratiques des anthropologues. Le désir de scientificité implique d’observer précisément, de mesurer, d’établir des classifications. De nombreux clichés servent à illustrer les publications et à mettre en place des théories raciales, notamment à Madagascar, où la « politique des races » est le fondement du gouvernement colonial du général Galliéni. Il prétend ainsi diviser administrativement l’île en fonction des différentes « races » la peuplant, et fait pour cela appel à des anthropologues qui tentent des définir des critères afin de différencier Merinas, Sakalavas, Betsimisarala, Betsileao, etc.
Domaine public
Zoos humains
À la fin du 19e siècle, l’exploration se décline « à domicile », notamment lors des Expositions universelles ou dans les jardins zoologiques.
Reprenant les représentations du lointain véhiculées par les récits de voyage, les ouvrages scientifiques et la littérature populaires, les affiches promouvant les expositions du Jardin zoologique d’acclimatation à Paris, mettent sur le même plan animaux et humains, exhibés dans le même espace clos. Tous les ressorts de l’exotisme sont convoqués : palmiers, tente, barque, quasi-nudité, postures accroupies ou alanguies…
Les premiers hommes exposés dans ces conditions, en 1877, furent des « Nubiens », présentés comme « accompagnateurs d’animaux ». Suivirent beaucoup d’autres groupes venus de tous les continents, « Esquimaux », « Gauchos », « Fuégiens », « Hottentots » ou, comme ici, « Indiens galibis » venus de Guyane française.
Particulièrement attractifs, ces zoos humains donnèrent lieu à des configurations de plus en plus mercantiles et spectaculaires, très peu soucieuses du bien-être des humains enrôlés pour ces expositions. Ils contribuèrent aussi à diffuser l’idée du racisme scientifique et la mentalité coloniale.
Mots-clés
Bibliothèque nationale de France
Bibliothèque nationale de France