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Des vaisseaux indiens de différentes manières

Détail du globe terrestre de Coronelli 
Des vaisseaux indiens de différentes manières
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Toute la mer des Indes étant remplie d’îles, c’est ce qui fait que les Indiens ne se servent point des astres dans leur navigation. Ils ne perdent guère la terre de vue et les côtes et les îles leur servent de guides comme elles en servaient autrefois aux Chinois dans la mer Méditerranée et dans l’archipel. Les Portugais leur ont appris l’usage de la boussole quoiqu’ils soient voisins des Chinois à qui plusieurs auteurs attribuent l’invention de cet instrument si admirable et si utile. Ils n’ont point de cartes géographiques et sont si peu entendus dans les choses essentielles de la navigation et de la manœuvre des vaisseaux qu’ils ne peuvent pincer le vent quand ils l’ont contraire, ce qui les oblige à attendre un vent et une marée favorable pour faire leur voyage.

Les vaisseaux indiens sont différents, tant par leur grandeur que par leur construction. Les uns sont couverts et ont un ou plusieurs ponts. Ils vont à rames et à voiles et la plupart ont l’un et l’autre tout ensemble, de même que les galères d’Europe. Ils n’ont point de gouvernail comme nos vaisseaux mais seulement deux avirons aux deux côtés de la poupe qui servent aux mêmes usages.

À 8 degrés de latitude : le grand est un navire que les Indiens nomment jonc, nom qu’ils donnent à la plupart de leurs vaisseaux. Celui-ci est couvert et a plusieurs voiles sans rames. Il sert particulièrement pour transporter des marchandises d’un lieu à l’autre. Le petit est une barque de pêcheur fort étroite qui est faite d’un tronc d’arbre. Elle a de chaque côté un gros roseau pour l’empêcher de verser. Elle porte une grande voile et va d’une telle vitesse que les Portugais l’ont nommée à cause de cela barque volante.

À 14 degrés de latitude : le premier et le troisième sont une espèce de galère qu’ils appellent cathur. Ces vaisseaux n’ont qu’un pont avec une galerie sur le derrière. Ils vont à voiles et à rames et sont armés de 6 pièces d’artillerie qu’ils appellent basses. Les rameurs et les esclaves sont enfermés sous le pont, mais les soldats sont dessus. Les Indiens s’en servent pour la guerre dans les sièges des villes qui sont situées sur les côtes de la mer. Le deuxième est un navire chinois dont les voiles sont faites de nattes de roseaux et qui a des ancres de bois. Il y a sur la poupe un homme qui frappe sur une timbale, instrument de musique fort commun sur les vaisseaux chinois. Je parle ailleurs d’un vaisseau de ce pays fait seulement pour le plaisir, où les rameurs rament de cadence au son de cet instrument.

Le quatrième qu’ils nomment paraos est couvert, à la façon d’un toit de maison. Il y a 6 hommes sur le devant pour ramer en cas de besoin, la voile est faite de feuilles de palmier ou de nattes de roseau. Ce bâtiment sert à faire la garde proche des côtes, pour aller à la recherche des pirates et pour prendre garde qu’on ne transporte les marchandises sans payer les droits. Le dernier est un grand vaisseau de guerre de l’île de Madure (moyenne île proche la côte nord de la grande île de Java, vers son extrémité orientale). Ce vaisseau a deux ponts et va à voiles et à rames. Il est monté de quelques pièces d’artillerie qui tirent 9 coups à la fois et de plus de 200 hommes tous armés de boucliers et de longues javelines. Tous ces peuples n’ont point de fusils parce qu’ils ne sont pas assez adroits pour s’en servir comme il faut.
À 20 degrés de latitude : Ce vaisseau se nomme dans les Indes caracola. Les habitants du royaume de Bantan et ceux de l’île de Fernate s’en servent ordinairement : Il est très vite ayant de chaque côté deux rangées de rameurs assis sur des bancs, attachés ensemble, et au vaisseau avec des cordes. Chaque banc est de 7 rames, de sorte qu’avec 28 rameurs ce vaisseau paraît voler. Les soldats sont sur un pont élevé et quelques-uns en ont trois faits en caillebotis.

Bibliothèque nationale de France

  • Date
    1681-1683
  • Lieu
    Paris
  • Auteur(es)
    Vincenzo Maria Coronelli (1650-1718), cartographe et cosmographe
  • Description technique
    Charpente en bois, armatures métalliques, peintures
    Diamètre : 3,85 m. 2,3 tonnes
  • Provenance

    BnF, département des Cartes et plans, GE A 500 RÉS 

  • Lien permanent
    ark:/12148/mm502200611q