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Mallarmé et le Coup de dés : bouleverser la page
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Le B de Bethsabée
Illustration et texte imprimé
![Apocalypsis [Apocalypse]](https://cdn.essentiels.bnf.fr/media/images/cache/crop/rc/ZuwychJh/uploads/media/image/20220621080952000000_257.png)
© Bibliothèque nationale de France
Apocalypsis [Apocalypse]
Annonçant la fin des temps telle qu’elle a été révélée à saint Jean, l’Apocalypse était fréquemment représentée au Moyen Âge, dans des manuscrits enluminés, sur des fresques, sur des tapisseries, telle la célèbre tenture d’Angers exécutée en 1377-1380 pour Louis Ier d’Anjou, ou sur des vitraux, dont la rosace commandée vers 1490 par Charles VIII pour la Sainte-Chapelle à Paris.
Enfin, au milieu du 15e siècle, paraît la première Apocalypse dont les images et le texte sont gravés sur bois et qui passe pour le livre xylographique le plus ancien.
Le modèle dont s’est servi le graveur est aujourd’hui perdu, mais il appartenait à un groupe de manuscrits d’origine anglo-française.
Sur deux pages en regard on voit ici, à gauche, en haut, un ange qui annonce aux hommes le jugement de Dieu et, en bas, un autre qui relate la destruction deBabylone ; à droite, en haut, un troisième ange menace ceux qui adorent la Bête et son image et, en bas, un quatrième commande à saint Jean d’écrire :
Beati mortui qui in Domino moriuntur… ( « Heureux ceux qui meurent dans le Seigneur », Apocalypse XIV, 6-13).
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L’imprimerie de l’image

Illustration pour L’Exode
La technique de la xylographie (du grec xulon : bois et graphein : écrire), longtemps utilisée pour la décoration des étoffes est antérieure de plusieurs siècles à l’invention de l’imprimerie en caractères mobiles de Gutenberg. Cette technique consiste à appliquer une feuille de papier sur la partie saillante et encrée d’une plaque de bois gravé, puis à la tamponner avec un frotton.
Au 14e siècle, la xylographie est notamment utilisée pour l’impression des images pieuses et des cartes à jouer. Cette technique survivra à la concurrence de l’imprimerie et conservera notamment un usage dans la décoration du livre.
Bibliothèque nationale de France
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L’image connut son imprimerie bien avant le texte, dans des gravures sur bois imprimées dès le 8e siècle en Chine, et au début du 15e siècle en France. Dans ce qu’on nomme livres xylographiques, les images sont gravées avec les textes dans la même plaque de bois, et donc imprimés ensemble. Les images reprenaient parfois les motifs des dessins qu’on retrouve dans des enluminures peintes. Imprimerie et miniatures furent alors en concurrence au point de provoquer des procès entre les enlumineurs et les graveurs et imprimeurs dont les images imprimées se vendaient bien moins cher.

Biblia pauperum
Albrecht Pfister, prototypographe (premier imprimeur) de Bamberg, est le premier à imprimer des livres en langue vulgaire et à illustrer la majorité de ses éditions avec des gravures sur bois, au style fruste mais expressif, montrant ainsi qu’il veut dépasser le public latiniste et lettré, clientèle des livres liturgiques, bibliques ou juridiques publiés jusqu’alors. Sa Biblia pauperum, ou « Bible des pauvres », juxtapose des scènes du Nouveau Testament et leurs préfigures tirées de l’Ancien Testament. Ce précieux recueil, aux images coloriées témoigne d’une technique spécifique, la xylographie ou gravure sur bois qui, au 15e siècle, est utilisée dans la fabrication des images pieuses, des cartes à jouer et des livrets xylographiques ou xylographes. On taillait des blocs de bois en laissant apparaître un dessin en relief, accompagné de quelques mots ou de quelques lignes de texte également gravés, que l’on encrait avant d’y appliquer une feuille de papier que l’on pressait au verso avec une balle de crin (la frotton). Cette technique est issue de l’impression sur les étoffes. Elle présente l’avantage d’une technologie simple qui ne nécessite pas d’investissement matériel important et peut s’exercer de façon itinérante, de ville en ville, de bourgade en bourgade. Mais ce qui lui permet de demeurer un artisanat est aussi ce qui mit un frein à sa diffusion. La xylographie est impropre à la multiplication de textes de quelque étendue : à part dans quelques essais (grammaire élémentaire de Donat), la priorité demeure à l’image, comme dans la Bible des pauvres, qui, avec l’Art de bien mourir, le Miroir de salvation humaine, la Vie de l’Antéchristz ou l’Apocalypse, constituent la plupart de la trentaine de « textes » ainsi reproduits. Une variante consiste en l’association des bois gravés accompagnés de la copie manuscrite des quelques lignes de texte nécessaires : on parle alors de chiro-xylographie. Elle démontre le faible coût de main d’œuvre des copistes ordinaires. Aucun de ces opuscules, tous aujourd’hui rarissimes, n’est jamais daté ni localisé.
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Leur répertoire était aussi moins savant que celui des livres manuscrits : il comprenait surtout des livres de morale comme L’Art de mourir, des calendriers, des vies de saints et histoires légendaires. L’invention des caractères mobiles consacra l’hégémonie du texte. L’illustration à la main était contraire à l’économie de l’édition et l’imprimerie condamnait les gravures sur métal (en creux) à demeurer hors-texte, puisqu’elles devaient être tirées sur des presses différentes de celle des caractères mobiles (en relief). Elle rendait difficile la cohabitation des images gravées en relief sur des plaques de bois avec l’impression des caractères rigoureusement calibrés. Elle marque le début d’une distinction entre le savoir empirique ou imaginaire des illustrations, et le savoir intellectuel ou spirituel de l’écriture. Le concept d’illustration naquit de cette ségrégation qui fait de l’image un accessoire au service du texte, son complément ou son ornement.
Encyclopédies
Les traités savants ne furent illustrés que tardivement, lorsque l’image fut créditée d’un accès à la connaissance qu’on ne reconnut longtemps qu’aux textes sacrés. Le Liber Floridus, encyclopédie composée par un moine de l’abbaye de Saint Omer vers 1120, est peut-être le premier livre à introduire des observations naturalistes dans des images essentiellement symboliques. L’illustration documentaire au sens moderne du terme ne trouva son expression qu’au milieu du 13e siècle avec des traités comme celui du franciscain Barthélémy l’Anglais, intitulé De Proprietatibus rerum. Signe de la sécularisation des savoirs, Charles V le fit à la fois illustrer et traduire en langue vulgaire sous le titre De la Propriété des choses. À partir du 16e siècle, l’illustration accompagne les grands ouvrages savants dans des domaines où les connaissances sont largement descriptives : médecine avec le De Humani corporis fabrica de Vésale (1543), atlas, géographies et livres de voyages, sciences naturelles. Avec les progrès de l’imprimerie, l’illustration se rend indispensable dans les livres de vulgarisation, comme Le Spectacle de la nature huit volumes de l’abbé Pluche qui connurent un grand succès en 1732.

Breviari d’Amor
Un riche programme iconographique accompagne cette encyclopédie en langue catalane qui exalte l’amour divin et la création. Zodiaque, constellations et travaux des mois inspirés des calendriers y tiennent une place particulière. Le Capricorne a ici, comme le texte le suggère, le corps d’une chèvre - prête à grimper sur la colline - et une queue de poisson. Le dernier signe, celui des Poissons, est représenté par deux poissons tête-bêche.
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Panthère et bêtes sauvages
Autour d’une panthère couronnée sont rassemblées quelques bêtes sauvages : lion, ours, sanglier, cerf, cheval, licorne, dromadaire et bélier. Dans la tradition du bestiaire, en effet, la panthère attire à elle tous les animaux par la douceur de son haleine ; et, dans son nom, il y a pan, qui en grec veut dire « tout ».
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L’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert marque le triomphe de l’image scientifique : alors que deux volumes de planches avaient été prévus, il en fallut douze publiés entre 1762 et 1772. Le premier dictionnaire illustré de Larousse parut en 1879, et le premier Petit Larousse illustré en 1906, avec 5 800 gravures.

Nouveau Larousse illustré
Ce premier grand titre de la maison Larousse à être orné de la célèbre semeuse d’Eugène Grasset se distingue du Grand Dictionnaire Universel par l’illustration omniprésente. À l’opposé du discours de combat de Pierre Larousse, un ton plus informatif et éducatif a été adopté. Ce titre phare de la firme pendant plus de trente ans a dépassé les 250 000 exemplaires. Un succès qui a laissé une trace durable dans la mémoire littéraire, qu’attestent Les Mots de Sartre : « Le Grand Larousse me tenait lieu de tout : j’en prenais un tome au hasard, [...] je l’ouvrais, j’y dénichais les vrais oiseaux, j’y faisais la chasse aux vrais papillons posés sur de vraies fleurs ».
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Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, par une Société de gens de lettres
Emblème des Lumières, l’Encyclopédie est la plus grande entreprise éditoriale du temps, qui fera vivre un millier d’ouvriers pendant un quart de siècle malgré les révocations de son privilège. Cette œuvre collective – 72 000 articles rédigés par plus de 150 collaborateurs – accorde une place prépondérante à l’image : les 2 885 planches répondent au principe exposé par Diderot selon lequel un « coup d’oeil sur l’objet ou sur sa représentation en dit plus qu’une page de discours ». Une grande partie des dessins sont copiés de La Description des arts et métiers, collection née d’un projet colbertien, mais que l’Académie des sciences ne publiera qu’en 1761. Les arts « mécaniques », jusqu’alors largement ignorés, y figurent dans leur ensemble ; en effet, par sa vocation pédagogique, l’Encyclopédie s’oppose au secret des ateliers et bouleverse la hiérarchie traditionnelle des connaissances. Elle rejoint ainsi l’idéal philosophique de Diderot : répandre un savoir libre de tout préjugé et superstition pour engendrer liberté et bonheur.
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Livres d’emblèmes
Alors que l’image devenait un moyen indispensable d’accès aux connaissances scientifiques, texte et l’image se disputèrent le terrain des livres et s’y associèrent. Naquirent à partir du 16e siècle des ‘dictionnaires’ d’images, iconologies, allégories, physiognomonies, dans lesquelles les images sont enregistrées et traitées comme des mots. L’Iconologie de Cesare Ripa (1593) fut la bible des peintres jusqu’au 19e siècle. La mode des emblèmes, ou des devises est particulièrement significative de ce besoin contradictoire ou complémentaire d’une écriture qui associerait indissolublement images et texte, que l’imprimerie avait dissociées. Dans l’Art des devises (1666), le Père Le Moyne, veut corriger « le besoin qu’a la figure de descendre du général au spécifique et du matériel au formel, par le moyen des paroles qui l’arrêtent à une signification particulière. » Autrement dit, fixer une fois pour toutes le sens des images comme celui des mots. Il faut d’un même coup, contrôler la frivole image par le texte studieux, mais aussi colorer l’abstraction de l’écrit par la vie des images. Tel était le double sens de l’adage emprunté par les humanistes à la Poétique d’Horace : Ut pictura poesis, qui visait à rendre la poésie pittoresque, mais qui signifia vite qu’il fallait élever la peinture au rang de la poésie et les peintres à celui des poètes. Les illustrations, souvent accompagnées de longs commentaires, doivent se donner à lire plutôt qu’à voir.
Légendes et titres

Biblia sacra Vulgatae editionis, dite Vulgate sixto-clémentine
Confrontée à la montée de la Réforme protestante qui a favorisé la diffusion du texte biblique auprès d’un large public grâce aux traductions en langues vernaculaires, l’Église catholique a ressenti l’impérieuse nécessité de réaffirmer sa doctrine : la Parole de Dieu se transmet par l’Écriture appuyée sur la tradition. Elle réunit le concile à Trente (1545-1563), qui donne en 1546 un statut d’authenticité incontestable à la version latine de saint Jérôme, la Vulgate, déclarée fidèle aux textes originaux ; mais, contestée par les humanistes de la Renaissance, elle est révisée et l’édition finale remaniée est publiée en 1592 sous les auspices du pape Clément VIII. Peu à peu, la notion d’authenticité se durcit au sein du mouvement de réforme catholique et cette version officielle se fige pour plus de trois siècles.
Parallèlement, la méfiance reste entière à l’égard des versions en langues vulgaires suspectées d’ouvrir la voie aux doctrines hérétiques. Ainsi, la Vulgate peut être considérée comme l’un des instruments de la Contre-Réforme catholique.
La première édition de la Vulgate sixto-clémentine s’ouvre par un magnifique frontispice orné de vignettes évoquant la Genèse et l’Exode, par deux grandes figures de Moïse et de David, et par celles, en bas de page, des quatre évangélistes avec leurs attributs ; au centre, Clément VIII remet la Vulgate à l’Église avec la devise « Accipe et devora » ( « Prends et mange » ) signifiant que la Parole divine est nourriture.
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Auprès de chaque illustration on trouve généralement une légende, c’est-à-dire ‘ce qu’il faut lire’ pour comprendre l’image. La légende peut être une simple identification ou un long commentaire mais il est rare que l’illustration en soit dépourvue, surtout dans le livre imprimé où l’impression des images est distincte de celle de la lettre, qui a ses propres graveurs. Au 17e siècle, l’illustration est rare dans les livres et se limite souvent à un frontispice au début de l’ouvrage. Le titre fait alors office de légende. Au 18e siècle, lorsque les illustrations envahissent les romans, leurs légendes sont directement extraites du passage correspondant dans le texte, ou, à l’exemple de ce que fit Jean-Jacques Rousseau pour la suite d’illustrations, publiée à part, de sa Julie ou la Nouvelle Héloïse, la légende est un texte différent, adapté à l’image. Cette indépendance de la légende trouva son expression dans les œuvres symbolistes, tels les recueils de lithographies d’Odilon Redon, dont la poésie mystérieuse enchanta Mallarmé. Le décalage d’une légende énigmatique qui projette l’image dans le rêve fut exploité comme un procédé littéraire par les surréalistes, notamment Max Ernst dans ses recueils de collages, et systématisé par certains illustrateurs modernes comme Ted Baxter. Dans le domaine de l’image documentaire, la légende est indispensable pour préciser l’image, et se traduit en mots-clés issus de thesaurus normalisés ou en ‘tags’ spontanés postés par les auteurs.
L’illustration romantique
Les techniques industrielles d’imprimerie développées en Angleterre d’abord puis en France à la fin du 18e siècle, ouvrent à l’édition un nouveau public avide d’images, tant pour l’instruction que pour la distraction. Dans la première catégorie, la gravure sur bois de bout (plus résistante que le bois ‘de fil’ utilisé depuis le Moyen Åge) permit à l’Anglais Thomas Bewick, de tirer à 1 500 exemplaires A History of Quadrupeds (1790), abondamment illustrée. Dans la seconde, la lithographie (1796) et l’eau-forte sur acier fournissent des milliers d’images à des livres de demi-luxe destinés à une nouvelle bourgeoisie, comme le Paul et Virginie de l’éditeur Curmer tiré à 30 000 exemplaires (mais il n’en vendra que 6 000) ou le Gil Blas de l’éditeur Paulin avec ses 580 vignettes. La lithographie permet aussi d’illustrer la presse. Le Charivari, fut, en 1832, le premier quotidien à proposer une image nouvelle chaque jour, où Daumier, Grandville et Gavarni se rendirent populaires. Apparaissent alors les revues éducatives : en Angleterre The Penny magazine (1832) suivi en France par Le Magasin pittoresque (1833), les magazines hebdomadaires d’actualité The Illustrated London news (1842) imité l’année suivante en France par L’Illustration. C’est alors que l’on put entreprendre l’illustration de grandes séries documentaires comme Les Voyages pittoresques et romantiques dans l’ancienne France de Taylor et Nodier (1820-1878), littéraires comme la Comédie humaine de Balzac, chez Furne en 1841, qui ont fait dire à Baudelaire que son époque avait le culte des images.

« Oh elle est délicieuse… »
Le succès de la poire séditieuse de Philipon est tel qu’on la retrouve dans de très nombreuses satires et caricatures. Ici, il n’est même plus nécessaire de la présenter formellement ou de la nommer pour l’évoquer. Ce dessin du grand caricaturiste Honoré Daumier (1808-1879) fait la démonstration de la puissance ravageuse du dessin de presse et constitue un hommage à ses vertus subversives.
Le motif du lecteur de journaux, et du Charivari en particulier, est fréquent chez Daumier. Il est utilisé ici comme prétexte commercial pour inciter le lectorat à se réabonner, avec cet avis clairement lisible : « Avis / Ceux de M. M. nos souscripteurs dont l’abonnement finit le 1er avril sont priés de le renouveler s’ils ne veulent pas éprouver de retard dans l’envoi du journal. » Ce clin d’œil à la vie du journal fait allusion au lien qui unit le lithographe au Charivari, son principal employeur, au rôle important qu’il y joue, en 1 840, et y jouera encore pendant plus de trente ans.
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Illustration et pédagogie

Phénomènes météorologiques
Le théologien, philosophe et pédagogue d’origine morave Jan Amos Komensky, dit Comenius, est souvent présenté comme le « père » de la pédagogie moderne. Les fondements pédagogiques de Comenius sont théologiques et philosophiques : seules l’éducation et la connaissance peuvent permettre à l’homme d’atteindre la "pansophie". Il est donc essentiel d’être attentif à l’éducation de la jeunesse dès son plus jeune âge, en suscitant à la fois son désir d’apprendre et son plaisir de jouer. Tout à la fois livre d’images pour enfants, dictionnaire bilingue latin-allemand - ou quadrilingue dans des éditions postérieures - manuel scolaire ou encore encyclopédie, l’Orbis sensualium pictus : hoc est omnium fundamentalium in mundo rerum & in vita actionum pictura & nomenclatura fut largement diffusé en Europe, Espagne et Portugal exceptés, avec notamment une traduction anglaise dès 1 659. L’image soutient, éclaire le mot, permettant ainsi à l’enfant de nommer ce qu’il voit. L’édition de 1658 s’ouvre sur un alphabet associant la représentation d’un animal, le bruit qu’il produit et la lettre que ce bruit évoque ; puis 150 thèmes ayant trait à l’univers, au monde minéral, au genre humain dans ses différentes activités, sans oublier les plantes et les animaux, sont traités par une image comportant des numéros qui renvoient, en regard, aux mots latins et allemands. (C. G.-B.)
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L’éducation par l’image eut à vaincre bien des préjugés. Pour les enseignants, l’image a toujours été synonyme de paresse et de vulgarité. L’image est réputée indocile parce que d’interprétation plus libre que l’écrit, d’abord plus sensuel qu’intellectuel. L’image n’était tolérée que dans des livres de géographie, de médecine ou de jardinage. Cette façon ‘d’enseigner à des taupes’ comme dit encore Anatole France au début du 20e siècle, fut de moins en moins supportable à mesure que les connaissances devenaient plus empiriques. En 1658 le pédagogue tchèque Comenius brisa le tabou en publiant son Orbis sensualium pictus, une méthode de lecture par l’image. Il fut suivi par le philosophe anglais John Locke (1693), puis par Jean-Jacques Rousseau, Johann-Heinrich Pestalozzi (1746-1827) et le pasteur alsacien Jean-Frédéric Oberlin (1740-1826) qui mit au point toutes sortes de jeux et de cartes pour l’enseignement. En 1833, Henri Martin publia sa première Histoire de France avec des figures, qui fit date ainsi que l’Histoire des peintres de toutes les écoles de Charles Blanc en 14 volumes (1861-1876).
Au 19e siècle l’illustration éducative était reléguée dans les images d’Epinal à qui le ministre de l’éducation de Napoléon III, Victor Duruy, commanda des planches pour les écoles, en même temps qu’il faisait entrer l’image dans le matériel pédagogique avec un Atlas (1840) et une Histoire grecque illustrée en 1851. Le Musée pédagogique, dans les années 1920, eut encore à se battre pour intégrer la photographie et le cinéma dans les écoles.

Les Quatre Fils Aymon
Les gravures sur bois en couleurs de cette image d’Épinal reproduisent avec force et simplicité la célèbre histoire des Quatre Fils Aymon, dans une débauche de couleurs vives et attirantes. Le dessin en est très simple, explicité par une courte légende retraçant les épisodes majeurs de l’ancienne chanson de geste, aisément reconnaissables par des lecteurs populaires.
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Richelieu
Plutarque et ses Hommes illustres adaptés pour les collèges ont constitué un des socles de l’éducation au 18e siècle et jusqu’après la Restauration. La République crée un culte civil des grands hommes au Panthéon, puis la légende napoléonienne comme les figures des grands rois Bourbons (Henri IV en tête) nourrissent l’imagerie populaire et les brochures. Mais il faut la poussée nationaliste consécutive à la défaite de 1871 pour voir les éditeurs produire de grands albums historiques, monographies brillamment illustrées consacrées aux grands souverains, militaires ou héros d’une histoire nationale fusionnelle à la Michelet. Combet, en 1901, lance une collection qui suit les grands titres de Job publiés par Charavay, Mantoux et Martin. Richelieu est suivi de La Tour d’Auvergne (1902), Le Roy Soleil (1904), Louis XI (1905), Henri IV (1907), François Ier (1909), Bonaparte (1910), Jeanne d’Arc (1912) et enfin Napoléon qui paraît seulement en 1921, après la « revanche ». Théodore Cahu comme Montorgueil et Toudouze sont des spécialistes du récit historique. Chacun de ces volumes, illustrés par Job, Leloir, Vogel, Robida ou Guillonnet, associe un texte généralement inspiré, souvent plein d’humour et des illustrations aux effets panoramiques impressionnants, à la fois saisissantes et pleines de vie, de détails, mêlant allégories, anecdotes, vie quotidienne et grande tradition de la peinture d’histoire. Les livres font revivre l’enfance et des moments parfois très intimes de ces gloires humaines, touchantes et admirables. Le Richelieu de Leloir (1851 ? -1940) est particulièrement remarquable par l’icônisation du cardinal, « l’homme rouge », décrit comme fondateur de la grandeur de la France, et symbole d’un gouvernement puissant et respecté, à l’intérieur comme à l’extérieur du royaume. Les résonances potentielles avec la France contemporaine déchirée par l’affaire Dreyfus sont assez troublantes. L’histoire enseignée dans les écoles de la Troisième République trouve ici sa plus belle illustration, indissociable d’une époque. (O. P.)
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Livres pour enfants
La littérature enfantine fut toujours un domaine de prédilection pour les illustrateurs. Elle fut cependant tardive car elle supposait qu’on portât attention à la personne de l’enfant ce qui ne fut guère le cas avant le 18e siècle. On la voit apparaître en Angleterre avec les Fables d’Esope en 1692, à l’époque où pédagogues et philosophes font sa place au sensualisme. Robinson Crusoë, Tom Pouce et Les Voyages de Gulliver fournirent un premier et inusable répertoire. En France, les premières éditions et le premier manuscrit même des Contes de ma mère l’oye, de Charles Perrault, sont déjà illustrées en 1697.
Au 19e siècle, la Comtesse de Ségur nourrit pour l’éditeur Hachette la Bibliothèque rose de jolis petits volumes illustrés par Gustave Doré ou Bertall, et l’autre grand éditeur, Hetzel, faisait illustrer avec succès les romans de Jules Verne. Les Anglais demeurèrent maîtres en ce domaine jusqu’à la fin du 19e siècle, avec les charmants dessins aquarellés de Kate Greenaway, Beatrix Potter ou Arthur Rackham. Les Allemands, avec Wilhelm Busch, et les Américains se firent aussi une spécialité de l’illustration pour enfants. Aujourd’hui, les illustrateurs pour enfants comme Pef ou Tomi Ungerer, sont devenus des vedettes de l’édition, où le secteur de la littérature enfantine est l’un des plus dynamiques. Il doit ce succès à l’intégration presque obligée d’une image inventive, intimement liée au texte, jouant avec lui une partie qu’elle gagne souvent.

Mistress Branican
La publication des œuvres de Jules Verne par Pierre-Jules Hetzel suit une stratégie éditoriale établie peu ou prou dès les premiers titres comportant trois étapes : une publication pré-originale dans un périodique, en tout premier lieu bien sûr Le Magasin d’éducation et de récréation, mais aussi Le Temps (8 titres), Le Journal (5 titres) ou Le Journal des débats (4 titres) ; une édition originale au format in-18 non illustrée (du moins jusqu’en 1893) ; enfin une édition illustrée au format grand in-octavo mise en vente à l’approche des étrennes sous forme brochée ou reliée ou richement cartonnée.
Les volumes en cartonnages pleine toile illustrés concentrent l’intérêt des collectionneurs verniens et témoignent du génie de l’éditeur Hetzel dans l’art de faire vivre son fonds. Sans entrer dans la distinction des variantes précisément décrites par les bibliographes (Piero Gondolo della Riva, André Bottin, Philippe Jauzac), on ne dénombre pas moins de six principaux types de cartonnages pour les volumes simples des Voyages extraordinaires et onze pour les volumes doubles, offrant ainsi un remarquable panorama des différentes possibilités d’illustration : décors dorés, argentés, or et noir ou polychrome, qui conjugués à la variété des couleurs de toile (rouge, vert gazon, sapin ou bronze, bleu ardoise ou santorin, havane, violet, grenat, etc. mais toujours rouge pour les polychromes) permettent une infinité de combinaisons. Au fil des ans, un même titre peut ainsi à plusieurs reprises faire peau neuve sous un nouvel habillage séduisant.
Rendons hommage pour finir aux relieurs industriels qui ont pour noms Magnier, Lenègre et Engel et plus encore aux graveurs de plaques, principalement Auguste et Paul Souze mais aussi Berger et Blancheland.
Domaine public
Domaine public

Vingt mille lieues sous les mers
« Bibliothèque d’Éducation et de Récréation, Voyages extraordinaires ».
« C’était un calamar de dimensions colossales, ayant huit mètres de longueur. Il marchait à reculons avec une extrême vélocité dans la direction du Nautilus. Il regardait de ses énormes yeux fixes à teintes glauques. Ses huit bras, ou plutôt ses huit pieds, implantés sur sa tête, qui ont valu à ces animaux le nom de céphalopodes, avaient un développement double de son corps et se tordaient comme la chevelure des Furies. On voyait distinctement les deux cent cinquante ventouses disposées sur la face interne des tentacules sous forme de capsules semi sphériques […] Sa langue, substance cornée armée elle-même de plusieurs rangées de dents aiguës, sortait en frémissant de cette véritable cisaille. Quelle fantaisie de la nature ! ».
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Albums
Un album est un livre aux feuilles vierges (alba = blanc) qui permet d’y coller des images ou d’y récolter des textes manuscrits. Le livre, conçu pour l’écriture, est inhospitalier à l’image. Le texte s’écoule d’une page à l’autre, la fragmentation des mots et la succession des lignes font partie de son principe. Les images en revanche sont des unités qu’on ne peut scinder, aussi s’intègrent-elles mal dans le flux du texte. Comme des bancs de sable dans un fleuve, elles interrompent le récit et sont elles-mêmes coupées parfois par le pli de la double-page. L’espace naturel de l’image est un cadre, celui des stèles, des affiches, des tableaux et des écrans. C’est l’écriture alors qui doit s’arrêter aux marges du cadre qu’elle ne peut transgresser. Pour réduire ces incompatibilités, l’illustration a eu recours à des ruses, par exemple des dépliants panoramiques, des suites de planches ajoutées aux livres de bibliophilie pour rendre aux images leur indépendance, ou la bande dessinée ou l’album, qui a la forme d’un livre mais qui ne sert que de support à des images indépendantes les unes des autres. Les collectionneurs d’estampes et de dessins constituèrent des albums sur le modèle des livres. Le collectionneur Michel de Marolles, avait collé ses estampes dans des albums qui, achetés par Louis XIV, en 1666, formèrent le noyau du Cabinet des estampes de la Bibliothèque nationale de France.

Livre de fontaines
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Au 19e siècle, chaque salon mondain avait son album, où les familiers étaient invités à laisser un dessin ou un poème, comme dans les ‘livres d’or’, couverts de signatures. Les enfants aiment constituer des albums d’imagettes et les albums accueillent les photographies de famille.
Bibliophilie
La bibliophilie est aussi vieille que le livre et sa tradition est inséparable du livre illustré car c’est souvent l’illustration qui fait du livre un objet précieux digne d’être collectionné. Les livres richement enluminés pour les princes du 15e siècle, ducs de Bourgogne, d’Anjou ou de Berry sont demeurés célèbres, mais c’est à l’heure de l’imprimerie et de l’industrialisation du livre que la bibliophilie devint un secteur particulier de l’économie du livre et un véritable ‘marqueur social’. Les grands in-folio imprimés par Didot à la fin du 18e siècle, époque à laquelle se constituent des sociétés de bibliophiles, les grands textes classiques finement illustrés par Charles-Nicolas Cochin signalent l’accès à la culture de riches bourgeois. Les Contes de La Fontaine édités en 1762 pour les Fermiers généraux (banquiers de l’époque) en deux petits volumes ornés de vignettes d’Eisen, atteint le sommet du raffinement. La bibliophilie, de plus en plus accessible, devint à la période romantique une mode et parfois même une folie. L’industrialisation de l’image provoqua sous le Second Empire une réaction destinée à protéger des œuvres conçues pour leur rareté et leur caractère précieux, riches donc en illustrations d’artistes. Depuis le début du 20e siècle de nombreux éditeurs, comme Maeght ou Skira, se sont spécialisés dans les livres luxueux accompagnés d’estampes originales ou même d’œuvres en exemplaires uniques pour distinguer les tirages de tête destinés à des amateurs choisis.

Le Cheval et le loup
En 1755-1759, l’édition en 4 volumes in-fol. des Fables de La Fontaine est illustrée en taille-douce par Charles-Nicolas Cochin fils d’après les dessins de Jean-Baptiste Oudry dans le style réaliste et classique qu’affectionne la reine Marie Leszczynska.
En 1762, les Contes du même La Fontaine sont ornés de 54 vignettes dessinées cette fois-ci dans un style léger et sensuel par Charles Eisen, autre protégé de Mme de Pompadour, pour l’édition dite des Fermiers généraux. Ces éditions luxueuses étaient très onéreuses et réservées à une petite élite d’amateurs fortunés.
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Bandes dessinées
La prolifération des illustrations dans la presse associée aux procédés modernes issus de la lithographie devait nécessairement aboutir à des essais de récits entièrement en images, ancêtres de l’image animée. On attribue au pédagogue et pasteur suisse Rodolphe Töpffer la primeur, dans les années 1830, de la bande dessinée avec ses albums griffonés des aventures burlesques de M. Jabot ou de M. Vieuxbois. Ils connurent aussitôt le succès et furent imités en France comme en Allemagne. Mais c’est aux Etats-Unis, à la fin du 19e siècle, que la bande dessinée moderne prit son essor dans les magazines illustrés populaires, dénués de toute prétention éducative, avec Richer Outcault et son Yellow Kid (1896), qui inspira en France les Pieds nickelés de Louis Forton (1908) dans le journal L’Epatant. Les éditeurs français résistèrent à la pratique, jugée vulgaire, de ‘la bulle’ pour garder le texte sagement inscrit sous les images comme dans La Famille Fenouillard de Christophe (1889), ou encore dans Becassine de Pinchon (1905). L’art de la bande dessinée fut le berceau des premiers dessins animés avec, en France, les animaux rieurs de Benjamin Rabier ou, en Amérique, l’œuvre fantastique de Winsor Mc Cay, Little Nemo in Slumberland, (1905) et avec la souris Ignaz, ancêtre de Mickey, né en 1928 et élevé dans les ateliers de Walt Disney.

Zig et Puce aux Indes
Premier dessinateur français à utiliser des bulles dans ses bandes dessinées, dès 1925 dans Zig et Puce, Alain Saint-Ogan n’hésite pas à briser le cadre linéaire des cases pour créer l’impression du mouvement. Cette page rappelle les anciens défilés royaux, entrées de villes, cortèges de couronnement ou d’enterrement qui faisaient l’objet de publications commémoratives souvent somptueuses.
© Paris, Hachette, 1932, tous droits réservés
© Paris, Hachette, 1932, tous droits réservés
La bande dessinée est devenue un ’huitième art’ célébré par les intellectuels inquiets du succès des Mangas, ces livres japonais presque idéographiques qui marquent le triomphe de la BD et une nouvelle conquête de l’image sur le texte.
Le livre illustré par la photographie
Dès l’invention de la photographie en 1839, on se soucia d’en illustrer les livres. Ce qu’avait cherché Niépce d’ailleurs était un procédé de photogravure qui aurait permis d’imprimer les images. Hélas le daguerréotype, exemplaire unique sur métal, ne s’y prêtait guère. Cependant dès 1842 parut le recueil des Excursions daguerriennes du physicien Hippolyte Fizeau dans lequel on les premières impressions d’une plaque ‘photogravée’. L’invention simultanée du calotype (négatif qu’on pouvait tirer sur papier) par l’Anglais William Henry Fox Talbot offrait une autre voie, pour des livres dans lesquels on collait des épreuves photographiques, ce qu’il fit pour son Pencil of Nature publié de 1844 à 1846. Aucun de ces procédés ne pouvait être industrialisé et l’on chercha longtemps la manière de graver des plaques pour l’imprimerie. Les tentatives furent très nombreuses, parfois remarquable par leur qualité (phototypie, héliogravure) mais fragiles ou capricieuses. La mise au point des trames, dans les années 1880, ouvrit la voie à la photogravure, liée à l’imprimerie de l’offset, dérivée de la lithographie et aux perfectionnements de la photographie. Dès lors, la photographie non seulement envahit l’illustration des livres scientifiques (archéologie, botanique…) ou de fiction, mais permit surtout l’essor de la presse illustrée avec la similigravure et la mise au point du cliché instantané en 1884 et l’apparition des agences de presse après 1904. En 1882, Charles Cros, pour une plaquette sur son ami Edouard Manet, imprima la première reproduction en couleurs.

Tête de l'une des statues monumentales du grand temple d'Abou Simbel
À plusieurs reprises, Du Camp envoie l’un des matelots de la dahabieh, Hajji Ismail, escalader les ruines et poser pour donner l’échelle. À Abou Simbel, c’est Louis Sasseti, domestique et laborantin occasionnel de Du Camp qui prend la pose. Conformément aux instructions de l’Académie, Du Camp réalise d’abord une vue d’ensemble des deux spéos puis une vue générale du spéos de Phré avant de prendre un cliché de chacun des colosses.
Bibliothèque nationale de France / Société de géographie
Bibliothèque nationale de France / Société de géographie

Petit temple d'Abou Simbel
Les deux albums du Voyage de Maxime Du Camp que conserve la Société de géographie comprennent 170 photographies (dont huit de Jérusalem et dix de Baalbek) sur un ensemble de 214 clichés rapportés par Du Camp. Ils proviennent d’Henri Duveyrier, éminent spécialiste du Sahara et photographe lui-même, qui légua par testament sa bibliothèque à la Société de géographie.
Bibliothèque nationale de France / Société de géographie
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Les livres d’artistes
On appelle livre d’artiste un livre dont le support, la structure et la forme font du livre une œuvre plastique à part entière. Le poème de Mallarmé Un coup de dés jamais n’abolira le hasard (1897) peut être considéré comme un prototype dans la mesure où son format, sa typographie et sa mise en page participent, par la volonté de l’artiste, de la création poétique elle-même. Tous les livres illustrés ne sont pas des ‘livres d’artistes’ lorsqu’ils se contentent d’associer un texte à des gravures originales. Les artistes modernes, en inventant des livres en forme de boîtes (Marcel Duchamp) ou de dépliants (La Prose du Transsibérien de Blaise Cendrars et Sonia Delaunay, 1913) ont inauguré un genre qui connaît depuis des développements considérables chez les artistes plasticiens. Ils peuvent par exemple considérer leurs carnets de croquis ou des ensembles de feuillets comme des livres aboutis. Ils peuvent utiliser la séquence des cahiers ou leur organisation interne pour organiser des suites de mots ou de photographies qui font du livre un espace aux qualités particulières. Ils peuvent aussi faire subir au livre des traitements divers : livres découpés, scarifiés, brûlés, collés ou emballés, jusqu’à ces sculptures en forme de livre qu’on appelle ‘livres objets’. Ils peuvent jouer sur le format, le pliage, la reliure ou la matière : livres en bois, en métal et même en fourrure. À la mode depuis les années 1980, le livre d’artiste demeure un des secteurs les plus inventifs de l’art contemporain.

Hassan Badreddine El Bassraoui : Conte des 1001 nuits
À partir de 1917, une renaissance de l’activité artistique que la guerre avait interrompue devient sensible et s’exprime notamment à travers la collaboration entre peintres et éditeurs.
Le décorateur André Mare (1885-1932) – à qui revient cette reliure pyrogravée et peinte – expose ainsi, depuis 1909, ses toiles avec ses reliures qu’il signe de sa main, comme un tableau. Figuratif, le dessin de Mare est généralement arrondi et clair, vigoureux et naïf, relevé de couleurs franches. L’aspect en est à la fois rustique par le matériau (parchemin) et raffiné par les transparences éclatantes que permet le procédé employé (peinture et vernis).
Le résultat est particulièrement heureux sur le volume exposé, qui est en outre le premier livre illustré du peintre Van Dongen. Le relieur y déploie son ornementation florale habituelle, relevée d’une seule allusion au conte et à son interprétation humoristique par l’illustrateur : deux grands yeux que Mare a coiffés d’un turban à la Poiret.
Bibliothèque nationale de France
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