L’imprimerie, une invention qui bouleverse l’Europe

La xylographie apporta une première réponse technique en permettant de reproduire une image en pressant sur le papier un bloc de bois sculpté, préalablement encré.

Connue en Corée et en Chine depuis le 8^e siècle, l’impression xylographique est d’abord utilisée en Occident pour imprimer les étoffes, les images pieuses et les cartes à jouer, puis des livrets de plusieurs pages, dont le plus ancien remonte à 1451-1452.

À cette époque, on recherche activement à reproduire des textes à l’identique. La technique de la gravure sur bois conservera, après l’invention de l’imprimerie, un rôle important dans la décoration et l’illustration des livres.

Au milieu du 15^e siècle, la mise au point de l’imprimerie par Gutenberg, après quinze années de recherches, bouleverse le monde du livre et la diffusion des idées en Europe. Son invention repose sur la combinaison de trois techniques : l’adaptation du principe de la presse, la mise au point d’une encre moins fluide que celle qu’utilisent les copistes et, enfin, la maîtrise de caractères mobiles en plomb, principe utilisé en Corée dès le 14^e siècle.

Le tout premier livre qu’imprime Gutenberg en 1455 est une Bible monumentale. L’édition des 643 feuillets de cette œuvre imprimée en noir – et, à l’origine, dépouillée de toute enluminure dans les marges – a nécessité plus de 3 millions de signes et 300 caractères typographiques différents. Ils imitent l’écriture gothique, utilisée dans les manuscrits liturgiques et comprennent des abréviations, des ligatures, et un grand nombre de lettres plus ou moins larges afin de permettre de bien justifier les lignes.

Quelques années après l’édition monumentale de la Bible de Gutenberg, ses anciens associés, Fust et Schöffer, publient un chef-d’œuvre typographique, le Psautier de Mayence.

Imprimé directement en trois couleurs sur vélin, le Psautier de Mayence comprend près de 500 caractères différents. L’imprimerie est désormais lancée et son principe, en dehors de modifications techniques, perdurera pendant cinq siècles !

L’imprimerie ne se serait pas développée sans l’arrivée en Europe du papier, inventé en Chine avant le 2^e siècle. Ses techniques de fabrication se répandent d’abord dans les pays musulmans puis autour de la Méditerranée. Elles atteignent l’Europe par l’Espagne et l’Italie à partir du 12^e siècle.

L’imprimerie arrive à Paris en 1466 et se déploie largement à Lyon, grâce à ses foires, dès 1473. Paris et Lyon concentreront la majorité de la production à la fin du 15^e siècle. On la trouve dans le nord de l’Italie, à Venise en 1469 où elle connaît une rapide expansion. Elle gagne l’Espagne en 1472, les Pays-Bas l’année suivante, puis la Pologne, l’Autriche et la Bohême quelques années plus tard ; l’Angleterre en 1476 et l’Europe du Nord dans les années 1480.

Dès la fin du 15^e siècle la majorité des villes universitaires possèdent des presses mais la clientèle universitaire ne procure pas des débouchés suffisants. Ce sont les grandes places commerciales qui deviennent les principaux centres de production et diffusion du livre. S’y expriment les besoins nouveaux d’une population bourgeoise intéressée par la jurisprudence, les almanachs ou les romans en langue française. Dans ces carrefours commerciaux l’édition trouve les capitaux importants nécessaires à son développement et les circuits de diffusions permettant d’écouler des tirages en nombre.

À la fin du 15^e siècle, Venise devient l'une des capitales du livre. La ville, où plus de 150 imprimeurs sont installés avant 1500, conservera une activité considérable pendant tout le 16^e siècle. Le Français Nicolas Jenson, formé à Mayence, séjourne plusieurs années dans la cité des Doges. Il excelle dans l’usage de l’écriture humanistique et fait appel aux meilleurs miniaturistes du temps pour illustrer l’édition de ses textes classiques.

Malgré le secret dont s’entourent les pionniers, l’imprimerie devient vite une aventure européenne. Appelés par des autorités ecclésiastiques ou des villes universitaires, les typographes allemands sont très mobiles et vont diffuser leur invention dans toute l’Europe, en commençant par les pays rhénans : Strasbourg, Bamberg, Cologne, Bâle, Augsbourg.