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Focus

Techniques d’illustration dans les livres imprimés

Avec le développement de l’imprimé, les techniques d’illustration de livres changent fondamentalement par rapport aux manuscrits médiévaux. Plus de peintre pour colorier chaque lettrine ! Il faut désormais pouvoir reproduire une image à de multiples exemplaires. La gravure jouera ce rôle.
Mirouer de la redempcion de lumain lygnage
Mirouer de la redempcion de lumain lygnage |

© Bibliothèque nationale de France

Les premières images imprimées apparaissent à la fin du 14e siècle, avant l’invention de la typographie par Gutenberg. Elles sont tirées à partir de planches de bois gravées en relief, utilisées depuis longtemps déjà pour l’impression des étoffes : cette technique de reproduction en série - la xylographie (du grec xylos « bois » ) - est attestée chez les Chinois dès le 8e siècle. Ces images, largement diffusées, figurent dans leur majorité des sujets religieux, souvent accompagnés d’une légende également gravée sur bois. Des livrets xylographiques, pour la plupart matériel d’enseignement religieux et moral où le texte est mis au service de l’iconographie, se répandent en Europe dans les années 1 460-1480, constituant un répertoire d’images que l’on retrouve dans l’ensemble de l’expression artistique du temps. Les premiers livres illustrés, comme les premiers livres imprimés, voient le jour en Allemagne vers 1 460.

L’illustration gravée intègre la page tout d’abord au lieu et place de l’enluminure : grandes représentations en tête de chapitres, bandeaux ou petites scènes, initiales ornées ou historiées. À partir du milieu du 16e siècle, elle participe largement au mouvement encyclopédique de recensement de la nature : la figuration d’animaux et de plantes, dans les livres d’histoire naturelle, fait part égale avec leur description écrite.

La gravure en taille douce

Epitome gestorum LVIII regum Franciae...
Epitome gestorum LVIII regum Franciae... |

© Bibliothèque nationale de France

La gravure dite en taille douce (plaque de cuivre gravée en creux à l’aide d’un burin) n’entre dans le livre qu’au milieu du 16e siècle, grâce à Christophe Plantin, le premier à introduire des planches gravées sur cuivre dans sa production de livres, à Anvers. Les contraintes techniques sont fortes : la gravure en creux sur métal entraîne le passage de la feuille sous deux presses successives, l’une pour le texte, l’autre pour la gravure, et donc oblige à placer l’image en dehors du texte ou à une place précisément convenue, dont le repérage s’avère très délicat. Beaucoup plus fin cependant que la gravure sur bois, ce procédé va bientôt conquérir tous les domaines de l’édition.
Au 17e siècle, la plupart des ouvrages comportent au moins un titre gravé. Titres, frontispices et planches sont, par leur situation hors texte, les lieux privilégiés des illustrations gravées en taille douce, et les livres de sciences sont parmi les premiers à bénéficier des progrès accomplis dans les reproductions des dessins.

La Description des arts et métiers, lancée par l’Académie des sciences, l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert, l’Histoire naturelle de Buffon sont des œuvres où l’image, par sa fonction documentaire, est aussi importante que le texte. À côté de ces planches descriptives, un type de gravures plus décoratif devient très prisé par les bibliophiles : les vignettes, qui ornent nombre d’ouvrages littéraires.

La lithographie

Catoptrum microscomicum…
Catoptrum microscomicum… |

© Bibliothèque nationale de France

Au 19e siècle, de nouveaux procédés de reproduction enrichissent la diversité des images qui foisonnent et envahissent désormais la couverture du livre. Avec la lithographie, technique aisée de gravure sur pierre calcaire à l’aide d’encre très grasse, le créateur compose directement sur la pierre, et s’affranchit du graveur.

La gravure sur bois de bout

Paul et Virginie
Paul et Virginie |

Bibliothèque nationale de France

Mais c’est surtout la gravure sur bois de bout, c’est-à-dire sur des blocs de bois sciés perpendiculairement aux fibres, gravure en relief très fine permettant de revenir à l’impression simultanée de l’image et du texte, qui opère un véritable changement dans la page. L’image, intégrée à la typographie, peut jouer, dialoguer avec le texte. Les vignettes ont perdu leur cadre classique et semblent projetées sur la page blanche, témoignant d’une liberté nouvelle.

Le champ artistique du livre

L’image remplit désormais les pages des publications populaires qui se multiplient. Romans, feuilletons, périodiques sont illustrés de scènes significatives de l’histoire, destinées à inciter à la lecture, alors que le texte est souvent en petits caractères. L’arrivée de la photographie et de ses procédés dérivés, comme la photogravure, facilite la présence de l’image dans les ouvrages imprimés, tout en changeant son statut. Censée reproduire exactement la réalité, elle remplit dès lors un rôle informatif, tandis que dessins et gravures, regardés comme une expression personnelle, donc subjective, vont occuper essentiellement le champ artistique du livre.