La maraude

Le Lorrain Jacques Callot (1592-1635), important graveur du 17^e siècle, possède style un très reconnaissable. Grâce à plusieurs innovations techniques, il est en mesure de produire des œuvres au dessin vif et aux nombreuses figures.

D’abord imaginée en petit format (les six planches des « Petites misères »), la série des Misères de la guerre est ensuite conçue en plus grande taille (les dix-huit planches des « Grandes misères »). Elle est publiée à Paris par son compatriote Israël Henriet en 1633, puis des légendes sont ajoutées ultérieurement, peut-être par l’abbé Michel de Marolles (1610-1681).

Le message de ces séries d'estampes est difficile à comprendre : peut-être faut-il y voir une protestation de Callot contre l’invasion de la Lorraine par les troupes françaises en 1633, bien qu'on n'y observe aucune référence à un contexte ou à des belligérants précis. Il est plus probable qu'il s'agisse ici de représentations génériques, destinées à une bourgeoisie bien au fait des idées qui circulaient alors sur la guerre.

Le terme de « maraude » désigne au 17^e siècle les vols de denrées alimentaires commis par les soldats en campagne, dans les environs de leur campement ou en s'éloignant de l'armée. C'est ce que représente Callot ici : l'auberge d'un village est soumise au pillage par un groupe de soldats. Des hommes se défendent, tandis que les soldats s'égaillent, emportant de gros sacs ou une chèvre. À l'arrière plan à gauche, le reste de la compagnie, s'empare de bétail.

Malgré la mise en place de mesures pour faciliter et régulariser le ravitaillement, les armées de la Guerre de Trente Ans se servent encore bien souvent sur l'habitant faute de vivres. Richelieu, dans son Testament politique, constate ainsi qu'« il se trouve en l’histoire beaucoup plus d’armées péries faute de pain et de police que par l’effet des armées ennemies » et prête une grande attention à l'organisation de l'intendance des armées. (Testament politique d'Armand du Plessis, cardinal de Richelieu, Amsterdam, 1688, deuxième partie, p. 111-115).