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Boîte d’allumettes en argent précieux et en émail

Boîte d’allumettes en argent précieux et en émail
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Les doigts surchargés de bagues et le gilet parsemé de boutons de diamants, Gabriele d’Annunzio fait fureur dans les salons parisiens. Une anecdote relatée dans L’Excelsior du 1er janvier 1921 met en lumière l’excentricité, mais aussi la générosité de ce grand dandy. À la sortie d’une représentation de la Pizanella, un journaliste vient féliciter D’Annunzio sur la beauté d’un camée d’apparence antique qui orne son annulaire. Flatté, le poète offre alors le bijou à son interlocuteur qui s’empresse dès le lendemain de se rendre chez un joaillier pour le faire estimer. Mais il s’avère finalement que le camée est en verre et la monture en toc. Le poète italien, qui se lie d’amitié avec Romain Rolland (1866-1944), prix Nobel de littérature de l’année 1915, et qui partage, selon Annamaria Andréoli, avec Sarah Bernhardt et l’écrivain Catulle Mendès (1841-1909) une loge au théâtre pour le premier acte du chef-d’œuvre dramatique d’Erich Wolfgang Korngold (1897-1957) La Ville morte, accumule les cadeaux à son entourage. Chez Buccellati, Gabriele fait des commandes pour Ida Rubinstein (1883-1960), étoile de l’Opéra de Paris. À la tragédienne Eleonora Duse (1858-1924), dont la relation est relatée dans L’invincibile puis plus tard dans Il Fuoco en 1900, il offre chez le même joaillier le « coffret des loups de Toscane », un porte-cigarette et, en 1923, un collier « précieux, mais particulier » en or jaune serti d’un pendant en béryl héliodore accompagné de 87 rubis. Quelques années plus tard, en 1927, il achète à Mario Buccellati le collier présenté ci-contre. En argent, or jaune, perles et diamants et complété d’une inscription gravée « Alla grande Elena » sur la boîte qui l’accompagne, ce bijou est donné à l’une des stars du cinéma muet italien, Elena Sangro (1897-1969). La relation entre Gabriele et Elena, évoquée par Franco Di Tizio, est passionnée et D’Annunzio compose la même année que le cadeau qu’il lui fait un court poème érotique Carmen Votivum, dédié « Alla Piacente » (« À l’agréable »). Ce sont ainsi des marque-pages, des porte-cigarettes et des boîtes à pilules sur lesquels le poète fait graver sa signature ou encore l’une de ses devises héraldiques : « Io ho quel che ho donato » (je reçois ce que je donne) qu’il fait réaliser à celui qu’il nomme dans un billet du 11 décembre 1922, le « Mastro Paragon Coppella » (Maître exemplaire du creuset). Une appellation qui surplombe le fronton des boutiques du joaillier. Avec D’Annunzio comme précieux ambassadeur de son travail, Buccellati ouvre, au plus fort de son succès dans les années 1925, une deuxième boutique à Rome, en plus de celle ouverte à Milan en 1919. Si les nombreuses lettres qu’ils s’envoient attestent sans conteste de la singulière amitié entre les deux hommes, elles permettent également de nous informer sur les commandes passées au joaillier. En 1924, un bracelet réalisé par Mario Buccellati illustre par les gemmes choisies (rubis et saphir), les couleurs héraldiques du « Prince de Montenevoso », nouveau titre accordé par le roi Vittorio Emanuele III (1869-1947) à Gabriele D’Annunzio. À sa dernière amante, la pianiste vénitienne Luisa Baccara (1892-1985) le poète offre une bague, sertie d’une kunzite taille coussin et de tourmalines, exécutée par Buccellati vers 1930 ainsi qu’une bague à tête d’aigle tenant dans son bec un cœur en pierre rouge et entre ses griffes la devise latine « cum pennis cor ». Si D’Annunzio reste toute sa vie fidèle aux créations du maître milanais, il achète également des bijoux au célèbre orfèvre de Turin, Musy. Un bracelet en or 750/000 représentant un ibis, nom de l’avion avec lequel l’homme de lettres, devenu aviateur, effectue un vol de propagande au-dessus de Vienne, le 9 août 1918, rejoint sa collection de bijoux.

© Collection historique Buccellati

  • Date
    Années 1930
  • Auteur(es)
    Mario Buccellati, joaillier
  • Description technique
    Argent et émail
  • Provenance

    Collection historique Buccellati

  • Lien permanent
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