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Des drôleries plein les marges : Bataille d’Auray (1364)

Jean Froissart, Chroniques
Des drôleries plein les marges : Bataille d’Auray (1364)
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En 1341, la mort sans héritier direct du duc Jean III de Bretagne ouvre une guerre de succession où s’aiguise la rivalité entre Français et Anglais dans le contexte de la guerre de Cent Ans. Une dernière bataille a lieu le 29 septembre 1364 à Auray. Elle oppose une armée anglo-bretonne aux ordres de Jean IV de Montfort à une force franco-bretonne soutenant de Charles de Blois. La victoire du parti pro-anglais établit Jean IV duc de Bretagne.
De nombreuses enseignes flottent au vent. Les archers anglais font peu de victimes et les chevaliers français avancent une hache à l’épaule. Plus loin, la mêlée des soldats.

Ces deux codices font partie d’un ensemble de quatre volumes des Chroniques de Jean Froissart (Paris, BnF, Mss, Français 2643-2646) réalisé pour Louis de Gruuthuse, dont les marques de propriété apparaissent en abondance dans les marges : son emblème la bombarde, sa devise plus est en vous parfois grattée et les initiales L et M retenues par un lacs pour Louis et Marguerite, son épouse. Bien que recouvertes par celles du roi Louis XII, qui entra à une époque indéterminée en possession de sa librairie, les armoiries de ce seigneur apparaissent par transparence dans les écus ou dans les oriflammes, à l’exception d’un écu de petite taille tenu par un singe assis au fol. 292 du premier volume (Paris, BnF, Mss, Français 2643).
Les miniatures des deux premiers volumes furent réalisées par Loyset Liédet et ses collaborateurs. Il y développe son style narratif très particulier. Ainsi, au fol. 292 du premier volume, illustrant la bataille d’Auray, dernière bataille de la guerre de succession de Bretagne dans le contexte plus large de la guerre de Cent Ans, on voit une troupe de soldats engagés dans un combat tandis que trois armées, représentées par des groupes compacts de casques derrière quelques chevaliers en pied, occupent presque tout l’espace d’un paysage profond à la ligne d’horizon haute et aux rochers quelque peu stéréotypés.
Les deux derniers volumes du Froissart de Louis de Gruuthuse (Paris, BnF, Mss, Français 2645-2646) ont été confiés à trois autres artistes brugeois : le Maître d’Antoine de Bourgogne, le Maître du Livre de prières de Dresde et le Maître de Marguerite d’York, qui ont pu travailler dans le même atelier. Le fait que Liédet ait assumé la réalisation de plus de soixante miniatures, alors que les trois autres enlumineurs ne s’en répartissent qu’une petite cinquantaine, atteste de la faculté de Liédet à s’adapter à des travaux de grande ampleur, nécessitant une force de travail et une rapidité d’exécution considérable. La datation généralement admise de ces miniatures se situe autour de 1470-1475. Mais le travail intensif qu’a fourni Liédet pour le duc de Bourgogne au début de cette période (soit au moins jusqu’en 1472) semble devoir repousser leur réalisation vers la fin de ces années.
Les décorations marginales des deux premiers volumes ont été réalisées sous la supervision de Liédet qui prend en charge les personnages et les animaux. D’après Ilona Hans-Collas et Pascal Schandel, les décorations végétales des miniatures à mipage du premier volume (Paris, BnF, Mss, Français 2643), ainsi que la totalité des encadrements du troisième volume (Paris, BnF, Mss, Français 2645), seraient l’œuvre d’un artiste qui a travaillé dans plusieurs manuscrits réalisés pour Louis de Gruuthuse, illustrés par le Maître de Marguerite d’York, tels une Cité de Dieu de saint Augustin (Paris, BnF, Mss, Français 17), un exemplaire de la première décade de Tite-Live traduite en français par Pierre Bersuire (Paris, BnF, Mss, Français 34), une Vie de saint Hubert d’Hubert le Prévost (Paris, BnF, Mss, Français 424) ou encore, un exemplaire contenant la Cité des dames et le Livre des trois vertus de Christine de Pizan (Paris, BnF, Mss, Français 1177). Cette collaboration avec un artiste actif dans l’atelier du Maître de Marguerite d’York montre que la division du travail est moins nette qu’il n’y paraît. Liédet a en effet pu sous-traiter le travail à cet artiste anonyme parce qu’il lui avait été recommandé par ses collaborateurs ordinaires.

Bibliothèque nationale de France

  • Date
    Vers 1475
  • Lieu
    Bruges
  • Auteur(es)
    Loyset Liédet, enlumineur
  • Description technique
    Tome 1 : Parchemin, 433 fol., 428-433 × 318-324 mm, 48 miniatures (Mss, Français 2643) • Parchemin, 356 fol., 433-435 × 317-319 mm, 13 miniatures (Mss, Français 2644)
    Provenance : Louis de Gruuthuse
  • Provenance

    Paris, Bibliothèque nationale de France, Mss, Français 2643-2653, fol. 292

  • Lien permanent
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