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Le lièvre

Gaston Phébus, Livre de chasse
Le lièvre
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Du lièvre et de toute sa nature

« Le lièvre est assez commune bête, aussi n’y a-t-il pas lieu de le décrire, car il y a peu de gens qui n’en aient vu. Ils vivent des blés et autres gagnages, d’herbes, de feuilles, des écorces des arbres, de raisins et d’autres fruits. [...] Donc la chasse du lièvre est très bonne, car elle dure toute l’année, comme j’aidit ; et le quérir est très belle chose, et le poursuivre aux lévriers, belle chose, et le prendre à force, belle chose, car c’est grande maîtrise, pour les subtilités et malices qu’il fait. [...]

Le lièvre ne vit pas longtemps, car c’est à peine s’il dépasse la septième année, quand on ne le chasse ni ne le prend. Il entend bien, mais il voit mal. Il a grand pouvoir de courir à cause de la sécheresse de ses nerfs. [...].

Le lièvre fuit de diverses manières, car certains fuient tout droit, tant qu’ils peuvent tirer, une ou deux lieues, puis ils fuient et refuient sur eux-mêmes et s’arrêtent quand ils n’en peuventplus ; et ils se font prendre, sans que de tout le jour on les ait vus, la première fois qu’ils ressautent, parce qu’ils sont à bout de forces. D’autres fuient un peu et puis demeurent et font cela bien souvent, et puis prennent leur fuite si loin qu’ils peuvent pour mourir. D’autres enfin se font prendre en leur gîte même, surtout si ce sont de jeunes lièvres qui n’ont point dépassé la demi-année. On reconnaît à l’aspect de leurs jambes de devant, quand les lièvres ont passé un an. [...]
Le lièvre se tient volontiers dans un pays et s’il a la compagnie d’un autre ou de leurs petits, il vit en groupe de cinq ou six. Jamais ils ne laisseront approcher, en toute la région qu’ils occupent, aucun lièvre étranger, sauf s’il est de leur nature. [...]

Les lièvres n’ont point de saison pour leurs amours, car il n’y aura jamais de mois dans l’année qu’il n’y en ait dechauds ; toutefois, habituellement, leur grand amour est au mois de janvier [...]. Les lièvres demeurent en divers pays et selon le temps, car les uns demeurent dans les fougères, les autres dans les bruyères, d’autres dans les blés, d’autres dans les guérets, d’autres dans les bois. [...]

Les hases portent deux mois leurs levrauts et, quand elles ont mis bas, elles les polissent de la langue, ainsi que fait une lice. Et puis elles s’enfuient au loin et vont quérir volontiers le mâle, car si elles demeuraient avec leurs levrauts, volontiers les mangeraient. [...]

On prend les lièvres soit aux lévriers et aux chiens courants à force, aux pochettes ou bourses, aux filets et réseaux et avec de menues cordelettes, en les tendant là où le lièvre aura fait ses brisées en allant à sa pâture, comme j’ai dit plus haut. [...] »

© Bibliothèque nationale de France

  • Date
    15e siècle
  • Lieu
    France, Paris
  • Auteur(es)
    Gaston Phébus, auteur
  • Description technique
    Peinture et or sur parchemin
  • Provenance

    BnF, département des Manuscrits, Français 616, fol. 24v.

  • Lien permanent
    ark:/12148/mm207200663r