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La loutre

Gaston Phébus, Livre de chasse
La loutre
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« De la loutre et de toute sa nature

La loutre est assez communebête ; aussi n’y a-t-il pas lieu de la décrire, car il y a peu de gens qui n’en aient vu. Elle vit de poissons et demeure autour des rivières, viviers etétangs ; elle mange aussi parfois des herbes des prés, quand elles sont tendres. Elle demeure sous les racines des arbres, près des rivières. Elle va à ses mangeures comme fait une autre bête, aux herbes seulement au printemps, et aux poissons comme il est dit. Elle nage à la surface des rivières ou par-dessous, quand il lui plaît, et ainsi nul poisson ne lui peut échapper s’il n’est pas trop grand. Elle fait de grands ravages dans les viviers et les étangs, car une paire de loutres, sans plus, videra bien de ses poissons un grand vivier et un étang, et c’est pour cela qu’on les chasse.
Elles vont en leur amour au même temps que les furets, ce que savent bien ceux qui en gardent chez eux. Et elles portent autant de petits qu’eux, tantôt plus, tantôtmoins ; elles mettent bas dans les creux, sous les racines des arbres, au bord des rivières. On les chasse aux chiens par grande maîtrise, ainsi que je le dirai plus loin. On les prend aussi dans les viviers avec des cordelettes, comme on fait des lièvres, aux filets, aux haussepieds et autres engins.
La loutre a mauvaise morsure et venimeuse aussi, et se défend bien de toutes ses forces contre les chiens. Et quand elle est prise dans les cordes et filets, si on n’arrive tôt, elle rompt les cordes avec ses dents et se délivre. Je n’en veux plus faire mention, non plus que de sa nature, carelle ne vaut que par sachasse ; toutefois, j’ajoute qu’elle a les pieds comme une oie, car elle a une peau d’un doigt à l’autre et ne possède pour talon qu’une bossette sous lepied ; on dit les marches de la loutre comme on dit le pied du cerf, et on appelle ses fumées fientes ou épreintes. La loutre ne demeure guère au même lieu, car, quand elle a effrayé ou mangé le poisson qui s’y trouve, elle va parfois une lieue en amont ou en aval, quérant les poissons, sauf si elle est dans un étang. »

© Bibliothèque nationale de France

  • Date
    15e siècle
  • Lieu
    Paris
  • Auteur(es)
    Gaston Phébus (auteur)
  • Description technique
    Peinture et or sur parchemin
  • Provenance

    BnF, département des Manuscrits, Français 616, fol. 37r

  • Lien permanent
    ark:/12148/mm2072006555