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Extrait

Newton mis en vers

Pierre Daru, L'Astronomie, 1830

D'autres ont pu sortir de l'abîme des âges,
Soit qu'échappé du sein d'un orbe étincelant
Un débris enflammé s'en éloigne en roulant,
Soit, et j'en crois Herschell, que dans son atmosphère
Le soleil ait produit une vapeur légère
Qui d'atomes flottant attirant le concours,
Obéit à cet astre et le suit dans son cours.
L'espace laisse errer cette masse fluide,
Et dans son mouvement sur son axe rapide
L'attraction la forme en un corps arrondi
Que vingt siècles peut-être ont à peine attiédi.
C'est un soleil nouveau que le monde a vu naître,
Lumineux par lui-même, et qui va ne plus l'être :
Mais non solide encore, et dans l'immensité
Lançant d'autres débris de son disque agité.
Maîtrisés, en tournant, par la loi qui les presse,
Son équateur s'élève, et son pôle s'abaisse
À mesure qu'il fuit dans les plaines du ciel
Le foyer enflammé de l'astre paternel ;
Sa chaleur s'amortit, sa matière plus dense
Règle enfin sa vitesse en gardant sa distance :
Le globe ardent n'est plus et l'on voit en son lieu
Rouler un monde éteint autour d'un astre en feu.
Tel fut le sort, dit-on, des sœurs de notre sphère
Qui jaillirent des flancs de leur glorieux père
Et, sur un même plan, circulant à l'entour,
Forment une ceinture au dieu brillant du jour. 

Jean Pierre Luminet, Les Poètes et l'Univers, Le Cherche-Midi, 1996.
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