Découvrir, comprendre, créer, partager

Extrait

Un simple grain de métal

Jules Verne, L'Île mystérieuse, 2e partie, chapitre 1

Il y avait sept mois, jour pour jour, que les passagers du ballon avaient été jetés sur l’île Lincoln. Depuis cette époque, quelque recherche qu’ils eussent faite, aucun être humain ne s’était montré à eux. Jamais une fumée n’avait trahi la présence de l’homme à la surface de l’île. Jamais un travail manuel n’y avait attesté son passage, ni à une époque ancienne, ni à une époque récente. Non seulement elle ne semblait pas être habitée, mais on devait croire qu’elle n’avait jamais dû l’être. Et, maintenant, voilà que tout cet échafaudage de déductions tombait devant un simple grain de métal, trouvé dans le corps d’un inoffensif rongeur !

C’est qu’en effet, ce plomb était sorti d’une arme à feu, et quel autre qu’un être humain avait pu s’être servi de cette arme ?

Lorsque Pencroff eut posé le grain de plomb sur la table, ses compagnons le regardèrent avec un étonnement profond. Toutes les conséquences de cet incident, considérable malgré son apparente insignifiance, avaient subitement saisi leur esprit. L’apparition subite d’un être surnaturel ne les eût pas impressionnés plus vivement.

Jules Verne, L'Île mystérieuse, Paris : Hachette, Jules Hetzel, 1973, p. 209-210.