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Les âges de la vie

Les six âges de l’homme
Les six âges de l’homme

Bibliothèque nationale de France

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Au Moyen Âge, on divise la vie en plusieurs étapes en fonction de chiffres symboliques : trois, quatre, six, sept ou douze. L’enfance, premier âge de la vie, peut elle aussi être subdivisée symboliquement.

Dans l’Antiquité, la vie humaine était généralement divisée en trois phases : l’enfance, l’âge viril, la vieillesse, liées à l’idée de croissance, de stabilité et de déclin. Chaque âge était représenté par un personnage de sexe masculin doté d’une caractéristique physique ou matérielle. Ainsi, dans les fresques funéraires de Rome, l’enfant apprend à marcher à l’aide d’un youpala ; il joue à la balle, à colin-maillard, aux devinettes.

Le Moyen Âge a hérité de cette division, mais le nombre des phases varie selon les auteurs et les siècles : trois, quatre, six, sept, dix ou douze. À l’intérieur de ces schémas, liés à la symbolique des nombres, il existe des subdivisions plus fines correspondant davantage aux réalités psychologiques, biologiques et sociales.

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L’arbre de consanguinité

La vie divisée en périodes

La symbolique des nombres

Trois

La division en trois âges connaît encore un certain succès au Moyen Âge, le nombre 3 étant essentiel dans la pensée occidentale puisque associé à la sainte Trinité, aux trois continents, à la Sainte Famille (deux parents et un enfant unique) et aux Rois mages. Ces derniers, en effet, dont le nombre n’était pas encore fixé à la fin de l’Antiquité, se limitent peu à peu à trois individus que les artistes représentent sous les traits d’un jeune homme, d’un homme d’âge moyen et d’un vieillard.

Quatre

Une autre correspondance s’est établie, depuis l’Antiquité, avec le schéma des saisons : sur ce modèle, Pythagore divisait la vie en quatre parties de vingt ans chacune. Le chiffre 4 est aussi associé aux éléments (air, eau, terre, feu), aux qualités naturelles (froid, chaud, sec, humide) et aux humeurs (bile, atrabile, sang, flegme), qui constituent le fondement de la médecine médiévale. S’y ajoute la symbolique chrétienne des quatre Évangiles, des quatre fleuves du paradis, des quatre vertus théologales… Le schéma des quatre âges traduit parfaitement l’idée selon laquelle l’Homme est un microcosme, c’est-à-dire un cosmos en miniature. Les artistes inventent de nombreuses variantes et affectent à chaque âge une caractéristique : une toupie pour l’enfant, une femme pour l’homme d’âge moyen !

Six

La symbolique du nombre 6 renvoie, pour les théologiens, aux six jours de la Création et à la théorie des six âges du monde émise par saint Jérôme et saint Augustin. Selon ces auteurs, l’histoire du monde peut être découpée en six périodes : la première va de la Création au Déluge, la deuxième s’arrête à Abraham, la troisième à David, la quatrième à Babylone, la cinquième à la naissance du Christ et la sixième à sa résurrection. Dans ce schéma de correspondance, le premier âge du monde correspond naturellement à la prime enfance (jusqu’à la chute des dents).

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Les âges de la vie

Sept

Le 7 a également son importance, puisque le septième jour est celui du repos de Dieu. À côté des sept planètes connues alors, il existe sept dons du Saint-Esprit et sept arts libéraux, sept vertus et sept péchés capitaux. Le schéma des sept âges de la vie, hérité de la tradition antique, est généralement divisé en tranches de sept ans (7, 14, 21…).

Douze

C’est à 12 ans que le Christ a commencé sa vie publique et il a eu douze apôtres. Le cycle de Noël, consacré à l’Enfant Jésus, comprend douze jours. Mais 12 est surtout le nombre des mois de l’année. Au début du 16e siècle, la division en sept âges est peu à peu abandonnée au profit de cette fragmentation plus longue. Pour les artistes qui mettent en images cette théorie, les deux premiers mois sont consacrés à l’enfance : janvier (stérile, comme l’est l’enfant, et illustré par des jeux, image même de la futilité) et février (âge de l’apprentissage, figuré par la scolarité). Des quatrains accompagnent ces images ; ils affirment que l’enfant de 1 à 6 ans « n’a ne force ne vertu » mais que celui de 6 à 12 ans s’améliore : « doux devient l’enfant quand a douze ans ».

Les subdivisions de l’enfance

Savants et pédagogues hésitent entre ces divers schémas, tous favorables à l’élaboration d’un discours symbolique dont les médiévaux sont friands. Chacun présente sa théorie, dans laquelle la période de l’enfance tient une place plus ou moins importante. Elle est parfois subdivisée pour mieux coller à la réalité de l’évolution psychique et physique des enfants.

L’avis des pédagogues

Le pédagogue Philippe de Novare, auteur d’un livre intitulé Les Quatre Âges de l’homme (vers 1260), divise la vie en quatre périodes de vingt ans : enfance, « jovence », « moyen âge » et vieillesse. Chaque âge est subdivisé en deux en son milieu, créant une alternance décennale. Une première enfance court donc jusqu’à 10 ans ; une seconde jusqu’à 20 ans.

Pour Gilles de Rome, précepteur du roi et auteur d’un livre d’éducation intitulé Le Livre du gouvernement des princes (vers 1280), la vie humaine comporte trois âges et la jeunesse est elle-même subdivisée en trois périodes, qui vont de sept ans en sept ans. Les âges clés sont donc 7, 14 et 21 ans.

Pour son contemporain Albert le Grand, chaque âge est lié à une planète. La première partie de l’enfance, jusqu’à l’âge de 4 ans, est sous la dépendance de la Lune, considérée comme l’astre des fous, des lunatiques ; c’est la raison pour laquelle, dans le langage proverbial, l’enfant est souvent comparé ou associé au fou. Une deuxième phase, de 4 à 14 ans, est sous la dépendance de Mercure : c’est l’âge des apprentissages ; de 14 à 21 ans, l’âge de la puberté, l’enfant est sous la dépendance de Vénus, la planète charnelle. Au-delà, il obéit au Soleil ; c’est l’âge de la vie militaire. Aldebrandin de Sienne, médecin de la fin du 13e siècle travaillant pour la famille des ducs de Savoie, rédige un Régime du corps dans lequel la vie est divisée en sept âges, dont trois sont consacrés à l’enfance.

Le schéma le plus courant

Parmi la multiplicité des modèles, une subdivision revient fréquemment et finit par s’imposer :

  • la petite enfance, jusqu’à la poussée dentaire ; divisée elle-même en deux phases, l’infantia (du latin infans, « qui ne parle pas » ) puis le temps des « dents plantées » (dentum plantatura) ;
  • l’enfance, jusqu’à 7 ans ;
  • l’adolescence, ou « seconde enfance », jusqu’à 14 ans minimum, voire 25 ou 30 ans, selon les auteurs ;
  • la « jeunesse », jusqu’à 28 ans, mais parfois aussi jusqu’à 45 ou 50 ans.

On le voit, les mots n’ont pas le même sens au Moyen Âge que de nos jours…

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