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Que signifie la roue de Fortune ?

La roue de Fortune
La roue de Fortune

Bibliothèque nationale de France

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Les vies de personnages célèbres racontées par Boccace dans le Des cas des nobles hommes et femmes sont marquées par des renversements de fortune. Elles sont pour l’auteur l’occasion d’une méditation sur l’instabilité du destin, la précarité du pouvoir et les dangers de l’orgueil. Rien d’étonnant à ce que bon nombre des manuscrits enluminés de ce texte s’ouvrent par une représentation de la roue de Fortune !

La roue, visible sur le premier feuillet, offre une image saisissante du rôle de Fortune dans la vie et l’histoire humaines, quand bien même Fortune elle-même n’est pas représentée. Au Moyen Âge ce symbole connaît une importante diffusion sous la forme d’une roue sur laquelle sont juchés quatre personnages en cours d’ascension ou de chute. Ce motif, apparu au 11e siècle, est une des trouvailles iconographiques les plus géniales du Moyen Âge. Elle permet de représenter non seulement la destinée individuelle mais aussi la fragilité du pouvoir temporel. La roue de Fortune devient dès lors une image de l’histoire, de la causalité historique et des changements politiques.

Au centre d’un paysage représentant l’ensemble du monde terrestre (la ville, la campagne et la mer), une roue à six rayons tournant dans le sens des aiguilles d’une montre supporte quatre personnages : au sommet, sur un trône, un âne à longue queue, couronné et tenant un sceptre à la main (bellua suprema, la bête suprême) ; à droite, un être hybride, mi-âne mi-homme, descend vers le sol (bellua cadens, la bête qui tombe) ; en bas, un homme couché, aux vêtements déchirés (bellua depressa, la bête à terre) ; à gauche, un être hybride, mi-homme mi-âne, est en voie d’ascension (bella ascendens, la bête qui monte). Près de chaque personnage se tient un ange.

L’image de ces personnages à l’équilibre instable, tour à tour glorieux ou humiliés, d’autant moins humains qu’ils sont au comble de la puissance, constitue une vive satire de la soif de pouvoir des hommes, élevés et rabaissés au gré des arrêts de Dieu, dont le portrait surplombe et domine toute la scène.

Les anges désignent des sentences bibliques suivies d’octosyllabes en français, auxquelles répondent celles attribuées aux « bêtes ». L’ensemble de ces textes donne le sens de la roue. Ils invitent les hommes à renoncer aux vaines gloires et à l’orgueil. Polysémie du symbole ! Au-delà de la métaphore de la fugacité du pouvoir, la roue de Fortune apparaît ainsi comme une invitation à l’humilité, sur le plan moral et politique.

Découvrez ce que disent les personnages dans l’image à explorer ci-dessous :

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