Découvrir, comprendre, créer, partager

Image

Chants royaux de l’Immaculée Conception de Notre-Dame de Rouen

La Table ronde en honneur triumphante
Chants royaux de l’Immaculée Conception de Notre-Dame de Rouen
Le format de l'image est incompatible

À la fin du Moyen Âge et au 16e siècle, les « puys » étaient des concours de poésie, à contenu mi-profane, mi-religieux, durant lesquels les candidats proposaient des poèmes à refrains appelés « chants royaux », sur un vers dit « palinodal » choisi chaque année par le nouveau maître de la confrérie qui les organisait. Répandus en France du Nord, tout particulièrement en Normandie, où ils étaient dotés par la bourgeoisie, ils donnaient lieu à des réjouissances populaires. Pourtant, les puys furent l’objet du mépris des poètes de la Pléiade, tel Joachim du Bellay : « Lis donc et relis premièrement, ô poète futur, feuillette de main nocturne et journelle les exemplaires Grecs et Latins ; puis me laisse toutes ces vieilles poésies françaises aux Jeux Floraux de Toulouse et au Puy de Rouen comme rondeaux, ballades, virelais, chants royaux, chansons et autres telles épiceries qui corrompent le goût de notre langue. »

Ce magnifique recueil réunit les pièces lauréates, pour les années 1519 à 1528, du Puy de l’Immaculée Conception de Rouen, qui se tenait tous les 8 décembre. On y relève notamment les noms de Clément Marot, de son frère Jean et de Guillaume Crétin. Il a été superbement enluminé par un collaborateur de l’artiste parisien Étienne Collaut, qui a illustré les cinquante chants d’une grande peinture à pleine page représentant soit l’une des corporations de la ville, soit le thème du poème.
La présence dans ce volume d’un chant royal consacré à la Table ronde, au Siège périlleux et à Galaad montre bien que les romans bretons appartenaient encore à l’imaginaire collectif dans les années 1530, au moins parmi la bourgeoisie marchande : si Montaigne assimilait les romans de Lancelot et de Tristan à « des livres à quoi l’enfance s’amuse », Du Bellay et Ronsard continuaient à les considérer comme des modèles dans leur Défense et illustration de la langue française.

Ici, l’antique motif arthurien est repris et contourné pour être mis au service de la symbolique chrétienne : gardée par les meilleurs chevaliers et restée sans tache, telle la Vierge, la Table ronde attend la venue de Galaad, le nouveau Christ, qui occupera le trône laissé vide. L’analogie entre la Table ronde et la table de la dernière Cène, à la veille de la mort du Christ, a été établie pour la première fois par Robert de Boron. Ici, par sa nappe brodée et ses mets abondants, elle évoque aussi la table de communion à laquelle chacun, dans sa quête, est appelé à goûter les nourritures célestes.

© Bibliothèque nationale de France

  • Date
    Vers 1530
  • Lieu
    Paris
  • Description technique
    Parchemin, 125 f., 310 x 210 mm
    Provenance : Mazarin ; entré à la Bibliothèque royale en 1668
  • Provenance

    BnF, Manuscrits, français 1537 (f. 75 v°-76)

  • Lien permanent
    ark:/12148/mm1182001265