Découvrir, comprendre, créer, partager

Image à explorer

Une scène de prédication à la fin du Moyen Âge

La prédication du frère Marc
Le format de l'image est incompatible
La prédication
Le format de l'image est incompatible
Le Mont-de-piété
Le format de l'image est incompatible
Les œuvres de miséricorde
Le format de l'image est incompatible
Le départ en pélerinage
Le format de l'image est incompatible
La voûte céleste
Le format de l'image est incompatible
L'Empyrée
Le format de l'image est incompatible
Explorer l'image

Cette gravure du 15e siècle a une vocation à l'évidence prosélyte et didactique : en faisant l'apologie de la prédication urbaine, en défendant un nouvel idéal de charité laïque par le biais du Mont-de-Piété et des sept œuvres de miséricorde et en invitant hommes et femmes laïques au pèlerinage en Terre Sainte, elle désigne aux fidèles les voies privilégiées du salut. Construite selon une perspective ascendante, elle se présente comme une métaphore de l'ascension spirituelle vers le paradis.

Mots-clés

Retour à l'image principale

La prédication du frère Marc

Cette gravure du 15e siècle a une vocation à l'évidence prosélyte et didactique : en faisant l'apologie de la prédication urbaine, en défendant un nouvel idéal de charité laïque par le biais du Mont-de-Piété et des sept œuvres de miséricorde et en invitant hommes et femmes laïques au pèlerinage en Terre Sainte, elle désigne aux fidèles les voies privilégiées du salut. Construite selon une perspective ascendante, elle se présente comme une métaphore de l'ascension spirituelle vers le paradis.

La prédication

Placée à la base de l'image, la prédication est présentée comme la base du salut. Développée au 13e siècle par les ordres mendiants, elle est une forme privilégiée d'enseignement des masses au Moyen Âge. Le public, très nombreux, appartient à toutes les couches de la société. 

Le franciscain en chaire est Fra Marco du monastère Monte Santa Maria in Gallo, connu pour avoir introduit en Italie, le premier Mont-de-piété. Il harangue la foule en brandissant un chapelet. Derrière lui, un novice se forme à l'art de la prédication, qui s'exerce en langue vulgaire, contrairement à la messe, célèbrée en latin. 

Rassemblés devant la chaire, un groupe d'enfantsn garçons et filles sans discrimination de sexe, assiste au prêche et bénéfice de l'éducation religieuse et morale de qualité qui dispense le moine franciscain. 

Représentent un autre public privilégié des frères prêcheurs, les femmes se tiennent assises par terre devant la chaire, ou, lorsqu'elles sont enceintes, sur une chaise sortie de leur maison. Les plus jeunes sont placées devant et les veuves, reconnaissables à leur barbette, derrière. 

Le troisième groupe réunit les hommes laïcs. À l'église, les fidèles s'installent dans un ordre hiérarchique très strict : hommes d'Église, nobles, hommes du peuple, femmes et enfants. Devant la chaire du prédicateur, l'ordre est inversé. 

Derrière le groupe des hommes laïcs, on reconnait quatre frères mineurs. Enfin, selon un schéma révélateur de la rivalité entre clergé séculier et frères prêcheurs, un groupe de clercs d'Église est relégué à l'extrêmité de la foule des auditeurs. 

Le Mont-de-piété

Au centre de l'image, une représentation symbolique d'un Mont-de-piété donne à voir l'organisation de l'action charitable dans les villes par les notables. Le Mont-de-piété est institution charitable introduite en Italie au 15e siècle. Il s'agit d'une caisse de secours où les nécessiteux à l'abri des usuriers peuvent recevoir de l'argent sans avoir à rembourser. Elle est alimentée par les notables de la cité qui espèrent ainsi gagner leur salut. 

Les pélerins, qui ont renoncé au monde pour faire le voyage outre-mer, sont au premier rang des nécessiteux concernés. Dans cette scène, un notable remplit de pièces le chapeau d'un pélerin âgé et expérimenté, accompagnant en pélerinage une femme et son enfant et une veuve reconnaissable à sa barbette. 

Un deuxième groupe de pélerins sur le départ, reçoit une bourse des mains d'un bienfaiteur de la cité. Les deux pélerins sont reconnaissables à leur bourdon ou baton de pélerinage. 

Accompagnée d'une duègne, une orpheline à marier, reconnaissable à ses longs cheveux et à sa mise modeste, reçoit une donne d'habits. Les villes italiennes disposent de caisses de dots pour les jeunes filles pauvres à marier afin de les empêcher de tomber dans le pêché et la prostitution.

Au centre, identifié par le phylactère le « mons pietatis » est figuré de manière symbolique sous la forme très concrète d'un monceau de pièces, de sacs d'or et de vêtements entassés en pleine rue. Les pièces de monnaie « purifiées » par l'usage charitable qui en est fait, deviennent un instrument de salut. 

Les œuvres de miséricorde

Une église et sept batiments, figurant de manière symobilique les œuvres de miséricorde, rappellent au laic qu'il peut abréger son temps de purgatoire en respectant les préceptes de l'Évangile selon saint Matthieu. Représentés de manière ascendante, ces édifices constituent les marches d'un escalier spirituel menant au ciel.

Sur le seuil de l'hôpital, un vieillard et un blessé à la tête bandée sont accueillis par un notable revêtu d'un tablier. À l'intérieur, les lits alignés accueillent les malades. Ils sont couchés à un par lit, ce qui témoigne du modernisme des pratiques médicales. Un jeune visiteur est à leur chevet.

Dans une demeure artistocratique, symboliquement ornée d'une cheminée crénelée, un notable habille un pauvre agenouillé, tandis qu'un autre, sommairement vêtu de sous-vêtements, nouveauté du Moyen Âge finissant, attend son tour pour recevoir une donne d'habits. 

À la porte d'une puissante maison, sans doute l'hôtel d'un riche marchand, un notable donne à boire du vin, boisson nourrissante et riche de symbolique chrétienne, à un aveugle ou à un voyageur. 

Sous l'encorbellement d'une belle demeure, un notable donne à manger du pain aux voyageurs de passage, dont un pélerin, reconnaissable à son bourdon.

Devant l'hospice des pélerins, deux pélerins sont reconnaissables à leur bourdon de pélerinage. Il existe des hospices de pélerins partout en Europe, et tous les fidèles leur doivent l'hospitalité sous une forme matérielle.

Le prêtre bénit le défunt sur le seuil de la maison mortuaire. C'est un notable, protégé par un tablier, qui se livre à l'inhumation : il s'agit probablement du membre d'une confrérie spécialisée dans le don de linceuls pour les pauvres, qui assume également les frais de l'inhumation. 

La prison est reconnaissable à sa grille, sa basse porte et à son crénelage. Le secours aux prisonniers est un devoir pour chaque homme de foi, invité à visiter les geôles, à distribuer la bonne parole aux prisonniers, à aider financièrement et moralement ceux qui sont libérés. 

L'église, réduite à son chœur, est identifiée par la croix qui la surmonte. Le prêtre, assisté d'un enfant chœur, y célèbre la messe : à l'extérieur, un autre clerc entend un fidèle en confession. Victime du succès du prédicateur franciscain, l'église semble un peu désertée. 

Le départ en pélerinage

À l'extrémité de la rue centrale, les habitants de la cité sont rassemblés au bord de la Méditerranée pour faire le voyage de Jérusalem. Épreuve physique autant que spirituelle, le pélerinage est pour le laïc le moyen suprême de gagner son salut, en répandant la parole de Dieu. 

Agenouillés et couronnés par des anges, le groupe de pélerins est réparti en deux demi-cercles : les hommes d'un côté, les femmes de l'autre. Plus en avant sur la gauche, un frère mendiant a donné l'exemple : il est déjà tourné, en prière, vers la rive opposée de la Méditerranée. 

L'image terrestre s'achève par une carte de la Méditerranée vue d'Italie, où figurent les étapes privilégiées du pélerinage à Jérusalem. La ville de Venise, surdimensionnée est la première : c'est de là que l'on embarque pour la Terre Sainte. Sur l'horizon, se dresse le mont Sinaï, terme du voyage. 

La voûte céleste

À la jonction entre la Terre et l'Empyrée, la voûte céleste, composée de plusieurs strates, est une allusion symbolique à l'échelle qui permet de rejoindre le paradis. 

Un espace vide isole la terre des planètes, c'est le ciel atmosphérique.

Les sept strates des cieux qui suivent la courbe de la Terre comprennent chacune une planète identifiée sous la forme d'un pictogramme. Le ballet des planètes est signifié par leur positionnement à différentes places de la voûte céleste. 

La huitième strate contient les étoiles fixes, innombrables. Le chiffre huit, selon Ambroise de Milan, l'un des Pères de l'Église, est « la somme de toutes les vertus ».

La neuvième strate, vide, plus mince, isole les planètes de l'Empyrée, c'est le « cristallin » ou 'premier moteur mobile', selon l'expression de saint Thomas d'Aquin, reprise par Marsile Ficin. Ce neuvième cercle assure le mouvement rotatif de l'ensemble de la mécanique céleste. 

L'Empyrée

Au plus haut des cieux, l'Empyrée devait rassembler Dieu et la Vierge. À la place du Père, c'est le Fils qui est figuré, reconnaissable à son nimbe crucifère. 

« Venez à moi, les bénis de mon Père » : le Christ, dans un geste de bénédiction, appelle à lui les fidèles élus qui, en récompense de leurs bonnes œuvres, se voient ouvrir les portes du paradis. Par cette phrase, il incite les chrétiens au pélerinage outre-mer. 

Mon cher Fils, je vous recommande mes plus chers enfants : la Vierge, figurée à la manière de la femme enceinte de l'Apocalypse, le corps entouré de flammes et auréolée d'étoiles, fait le même geste de bénédiction que son Fils. Patronne des pélerins, elle appelle sur eux la protection divine. 

Le cercle blanc éblouissant représente la perfection infigurable de Dieu. La lumière divine est un motif théologique récurrent chez les humanistes florentins. Le cercle lumineux évoque l'œil de Dieu, toujours ouvert, qui juge sans répit les pêchés des hommes. Il est entouré de la garde rapprochée des séraphins. 

Le reste de l'Empyrée est habité par les légions célestes, anges armés de masses, d'épées, de verges ou de la palme. Mais l'on n'y voit pas de laïcs, pas même de saints ou de grands clercs d'Église.