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Les cartes catalanes de Majorque

Le roi Musameli
Le roi Musameli

© Bibliothèque nationale de France

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Aux 14e et 15e siècle, un nouveau foyer de cartographie se développa bien à l’ouest de Gênes, dans les îles Baléares. Plusieurs cartographes majorquins renommés y furent les pourvoyeurs d’une clientèle principalement catalane et européenne, mais aussi aragonaise.

Le royaume d’Aragon s’était créé un vaste empire maritime dans toute la Méditerranée et au-delà. Dès la fin du 14e siècle, il avait conquis Valence, la Sicile, Murcie et la Sardaigne, créant une vaste entité qu’unifiait la langue catalane. Le commerce avec l’Afrique du Nord, où aboutissait la route de l’or africain, était une part importante de son activité. Mais ce royaume entretenait aussi des ambassadeurs permanents auprès du khan de Perse et ses marins avaient probablement guidé les Génois sur les côtes atlantiques. Il était donc légitime qu’après avoir accueilli quelques fabricants de cartes génois, ils aient eux-mêmes cherché à maîtriser cette technique. Ils devaient l’enrichir considérablement, car leurs navigateurs, leurs marchands et leurs diplomates appartenaient pour la plupart à la communauté juive de Majorque qui, grâce à ses contacts avec des corréligionnaires de l’autre rive de la Méditerranée, disposait d’informations nouvelles et d’une ouverture sur la science arabe.
Les cartes majorquines, encore appelées catalanes du nom de la langue dans laquelle elles sont rédigées, qui nous sont parvenues sont peu nombreuses, mais exceptionnelles. La plus ancienne est celle d’Angelino Duclert, établie en 1339. Appartiennent aussi à cette catégorie le merveilleux Atlas catalan de 1375 et la non moins extraordinaire carte de Mecia de Viladestes (1413).

Le grand intérêt de ces cartes portulans provient de leur extension aux régions extra-méditerranéennes : côtes d’Atlantique, d’Afrique, d’Asie. Elles nous permettent de revivre la phase de préparation des grandes expéditions avant l’hégémonie des autres puissances ibériques : le Portugal et la Castille.
Plus encore que les cartes italiennes, les cartes catalanes trouvent audience hors du milieu des pilotes qui semblent du reste avoir renâclé à les utiliser, au point qu’une ordonnance du roi d’Aragon, en 1354, imposa à chaque galère d’avoir deux cartes nautiques à bord. Hors du milieu de la navigation, la fascination dut être grande pour ces encyclopédies imagées, merveilleusement belles, qui montraient le monde connu sous tous ses aspects : géographique, historique, mais aussi politique, économique et commercial. Ce n’est donc pas un hasard si l’Atlas catalan fut l’un des joyaux de la « librairie » du roi de France Charles V et s’il demeure l’un des trésors de la Bibliothèque nationale.

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Producteur délégué : CNRS, unité « Cultures, langues, textes » en coproduction avec la BnF et CNRS Images © CNRS-BnF, 2019

La carte de Gabriel de Vallseca

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