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Les impressions polychromes

La cueillette des feuilles de mûrier en Chine
La cueillette des feuilles de mûrier en Chine

Bibliothèque nationale de France

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Héritière de l’art du pinceau, l’impression chinoise joue généralement des contrastes en noir et blanc. Pourtant, dès le 14e siècle au moins ont lieu des essais d’impression en couleurs.

Cherchant à reproduire en série, plus rapidement, des images jusque-là tracées au pinceau, les premières impressions xylographiques sont imprimées à l’encre noire. Plus rares sont les tirages à l’encre vermillon, empruntée à la tradition de l’impression des sceaux, qui donne plus d’éclat, et de prix, aux effigies bouddhiques.

Les gravures les plus élaborées, se réclamant des images peintes de couleurs vives sur des bannières de soie, à même les parois des sanctuaires, ou sur des feuilles de papier que l’on apposait aux murs pouvaient être rehaussées de couleurs, telle la Guanyin à la branche de saule. Des motifs décoratifs, géométriques le plus souvent, mais aussi floraux, étaient couramment imprimés en couleur sur des étoffes ou sur du papier. Les deux bandes du papier de montage de la gravure en sont un des plus anciens témoignages.

Un grillon posé sur une grenade ouverte
Un grillon posé sur une grenade ouverte |

© Bibliothèque nationale de France

Les textes manuscrits étaient calligraphiés à l’encre noire, mais l’usage, attesté par maints exemples, était de noter ponctuation et commentaires à l’encre rouge. Le Yongle dadian, la grande encyclopédie impériale compilée entre 1403 et 1407 donnait le texte de base calligraphié en noir, notant les sources à l’encre rouge.

Des essais d’impression xylographique polychrome ont vraisemblablement été faits à des dates anciennes : un témoin isolé, un texte bouddhique imprimé en noir et en rouge au 14e siècle, est actuellement conservé à Taibei. Cependant, la tradition bibliographique chinoise considère l’impression polychrome comme l’innovation technique majeure de l’imprimerie sous les Ming (1368-1644).

Elle attribue la paternité de l’invention de la technique des « planches en séries » pour l’impression des textes à Min Qiji, et celle de la technique des « planches disposées » pour l’impression des illustrations à Hu Zhengyan. Ces techniques étaient utilisées auparavant par des artisans, restés anonymes, pour la production d’images assez simples, images de Nouvel An, papiers à lettres décorés ou papiers peints, dont la tradition se perpétuera d’ailleurs jusqu’au début du 20e siècle.

Min Qiji – et bien d’autres dont la production lui a été un peu vite attribuée – et Hu Zhengyan ont su porter cet art à la perfection. L’exemple le plus achevé en est peut-être un ouvrage presque inconnu, « Les Dix vues du Mont Wu » qui garde secret le nom de ceux qui l’ont imprimé.

Vues remarquables du mont Wu
Vues remarquables du mont Wu |

Bibliothèque nationale de France

Vues remarquables du mont Wu
Vues remarquables du mont Wu |

Bibliothèque nationale de France

Vues remarquables du mont Wu
Vues remarquables du mont Wu |

Bibliothèque nationale de France

Vues remarquables du mont Wu
Vues remarquables du mont Wu |

Bibliothèque nationale de France

À ce niveau, il ne leur survivra pas longtemps : la basse vallée du Yangzi sera dévastée à la chute de la dynastie Ming (1644) et l’instauration du pouvoir mandchou brisera l’extraordinaire créativité artistique qui s’y manifestait jusque dans l’imprimerie.

La tradition n’était cependant pas perdue, la parution entre 1679 et 1701 de l’« Album du Jardin grand comme un grain de moutarde » en est la preuve. Les « Estampes Kaempfer » dont on ne connaît que quelques dizaines de tirages de par le monde, vraisemblablement produites à Suzhou vers 1680 par la famille Ding, en sont un nouvel achèvement, de même que les grandes gravures témoins exceptionnels et rares d’une longue pratique artisanale.

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